Tuesday, January 06, 2009

Adorable Hélèna

L’histoire de la concordance des temps fait des vagues. C’est vrai, foutez-nous la paix ! Paris n’a jamais été plus chouette, projeté en haute montagne. Tout à l’heure, j’ai longtemps cherché l’adresse de l’anniversaire de Cecilia, y avait pas un chat dans les rues, j’ai pas pu acheter de l’alcool, au Monop’, y avait marqué qu’ils n’avaient pas le droit d’en vendre après 21h. Je débarquais… Il paraît que ça fait déjà cinq ans… C’était tellement beau toutes ces bouteilles… intouchables. J’ai marché, marché, emmitouflé de laine, j’ai trouvé une entrée d’immeuble, je n’étais pas sûr que le code ait ouvert la porte, je crois qu’elle était déjà ouverte, je me suis battu avec l’interphone, une voix me demandait qui j’étais, ne comprenait pas ce que je disais, la porte ne s’ouvrait pas. J’appelais Cecilia qui ne répondait pas. Finalement un homme est passé, j’ai pris sa suite, au deuxième, l’appartement était grand ouvert, une femme en petite tenue, j’ai pensé : ça y est, la partouze est déjà commencée, je suis trop en retard… Elle m’a dit : « C’est demain, c’est demain, l’anniversaire de Cecilia. »

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La loi

Bon, finalement, Hélèna est venue jusqu’à chez moi, elle voulait savoir « si on s’quittait ou pas ». Elle me dit : « Ce dialogue, j’l’aurais pas écrit comme ça ; je n’ai jamais dit : « sur la table basse du salon ». J’avoue que, là, c’est une liberté que j’ai prise, afin, pour le lecteur, de situer l’environnement. « Sur la table basse du salon », il me semble qu’on situe plus facilement… Je me souviens que tu as dit : « D’ailleurs, y en a une qui t’attend sur la table du salon ! » (Le « salon » est la première pièce à l’entrée où j’ai l’habitude de poser mes vêtements, parce que, sinon, si je me déshabille dans la chambre, dans la grotte, où y a un tel bazar de tentures, de livres, de vêtements en vrac, de souvenirs de bric-à-brac, je ne retrouve rien le lendemain.) – j’ai rajouté « basse » pour qu’on situe, qu’on comprenne, tu comprends ? – Je m’appelle Villebasse. (Alors là, une parenthèse : oui, pauvre scoop, Hélèna Villovitch n’est pas vraiment une Juive d’Europe Centrale, elle s’appelle, pour l'état civil, Hélène Villebasse – comme Marguerite s’appelait Donnadieu, si vous voulez – et elle vient de Bourges, dans le Cher.) C’était donc ça. La psychanalyse à la maison. Je propose de transformer la phrase et de mettre : D’ailleurs il y en a une qui t’attend sur la vile table basse du salon ! Comme ça, le lecteur sera bien sûr que tu n’as pas parlé comme ça… Ensuite on parle des romans, des nouvelles… Borges, Carver… Puis une chose encore, je reparle de Véronique Müller, cette fille qui était tombée amoureuse de moi l’été dernier via le blog, il me semble qu’elle ne m’avait pas dit son nom… elle m’a écrit, je me suis même demandé si ce n’était pas la sœur d’Yvonnick Muller… Elle m’écrit : « (…) (J’attends la sortie du livre de votre amie. (ton Pierre – elle passe au tu –, ma foi, fait des fautes de concordance de temps. Pour ce qui est de moi, ça m’est égal, mais je crains que lui, qui a l’air d’y tenir, à la loi, ne s’en afflige quelque peu. (Ah, je n’ai pas du tout aimé l’attaque qu’il a faite de la « femme aux courgettes ».) (…) » Elle m’avait dit qu’elle était furieuse de mon amour pour Thomas, cet été, mais, Hélèna, toi, elle t’aime bien, tu as l’air d’être une sœur pour elle. Hélèna me dit : « Moi aussi, je trouve qu’il fait des fautes de concordance de temps. » Ah, bon ? Si elles s’y mettent toutes… On n’a plus qu’à affûter nos courgettes ! Je me souviens alors (puisque je me souviens, en ce moment, et que je vis à moitié, comme dit Pierre, dans les eilletizes), je me souviens comme j’avais eu la tehon quand j’avais osé, une fois, faire une critique à Marguerite Duras – ça, il faudrait un livre de Nathalie Sarraute pour en parler – J’avais osé… j’avais dit… j’avais pas dit que c’était ma mère qui me l’avait dit, mais c’était tout comme, j’avais dit (…dans Emily L, page …), j’avais dit qu’il ne fallait pas dire « deux à trois jours », mais « deux ou trois jours »… Marguerite Duras m’avait dit : « C’est vrai. », puis ç'avait été fini, ç'avait été horrible. Le plus horrible que j’ai jamais vécu avec elle, peut-être le plus horrible de ma vie. Je crois que j’aurais pu me jeter dans la Seine… Moi... et mon père. Le monde disparaître. Voyez.

On parle aussi de Chloé Delaume* dont Hélèna vient d’adorer le dernier livre, très réussi. Hélèna est un peu fâchée parce qu’elle voulait faire un grand papier dans « Elle », mais sa chef a dit : « Ah bon, t’as adoré ? Augustin a détesté. Vous n’avez qu’à faire un « Pour ou contre » ! » – Eh bien, c’est très bien un « Pour ou contre »… – Oui, mais c’est plus court… (Hélèna est payée à la ligne.) En tout cas, j’ai eu Augustin qui est d’accord, mais je lui ai dit de ne pas être trop méchant avec Chloé Delaume, parce que je l’aime bien, moi, Chloé Delaume, le livre est très bien, très beau, elle parle de son père qui a tiré sur… – Encore ! – Oui, mais, attends, y a du nouveau : c’est pas son père ! – Ah bon ? Ben alors, maintenant, tout va bien ! – Non, en fait, c’est pire, c’est sa cousine qui le lui dit… – Elle le savait comment ? – Elle le savait depuis toujours, c’est ça qui démolit Chloé. – Mais son père, c’est qui ? – Elle le connaît pas, il vit quelque part au Liban, sa mère a épousé « son père » déjà enceinte. – Elle fait une psychanalyse, Chloé Delaume ? – Oui. – Alors, c’est ça, on s’en sort pas, quand même, toujours ces récits de psychanalyse… Puis j’ai demandé à Hélèna (qui faisait la fine gueule évidemment) de sortir – ou de dormir – soit de sortir, soit de dormir – car je voulais écrire ça. Je repensais à la phrase de Pierre, lue dans son « diablogue », la citation d’Henry Michaux (Poteaux d’angle): « Pourquoi des conversations ? Pourquoi tant d’échanges de paroles des heures durant ? On revient s’appuyer sur un environnement proche et avec des proches s’entretenir de proches, afin d’oublier l’Univers, le trop éloignant Univers, comme aussi le trop gênant intérieur, pelote inextricable de l’intime qui n’a pas de forme. » Dans quelques minutes je vais à la danse, cours du soir ; plus tard, je vais à l’anniversaire de Cecilia qui rentre des Indes (c’est comme ça qu’on dit : des Indes ? – c’est comme ça qu’on dit chez Virginia Woolf), j’aurais encore rien foutu de la journée ! Les factures qui s’amoncellent, l’administration qui traîne, les projets qui ne se font pas… J’envie Pierre de travailler au ministère, lui, au moins, des heures de bureaux, le carcan des heures de bureaux – être au cœur de la chose – la liberté comme une nécessité vitale. Bises à toutes et à tous

YN, 6 janv.






*http://www.chloedelaume.net/

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La plus belle phrase

« Kate Moran lost her phone in a snow bank and needs a new one. »

(Sur Facebook.)

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Réconciliation avec Thomas (après une dispute sur Facebook)

Le 6 janv. 09 à 12:23, Thomas Ferrand a écrit :

Salut la cruche cassée
tu n’as pas que 2 fans puisque je te lis assidûment pratiquement tous les jours. Mais sûrement tu es très sélective et décide de qui est fan et de qui vaut de l’être. En somme, tu es une vraie petite pute, au talent indéniable.
Je t’embrasse amèrement de Gand.

adresse skype : tomamurmure



Le 6 janv. 09 à 14:09, Yves-Noël Genod a écrit :

oui, allez, on fait la paix, « j’t’adore », comme disait Marguerite Duras à son fils avec lequel elle venait de se disputer... t’es gentil dans ton message, là, j’penserai à toi en écrivant, bébé, tu me re-excites !

sèche tes larmes


Yvno



Le 6 janv. 09 à 14:09, Thomas Ferrand a écrit :

tu m’as fait beaucoup de chagrin

adresse skype : tomamurmure



Le 6 janv. 09 à 14:33, Yves-Noël Genod a écrit :

j’étais furieux

mais ça va, ça va, j’te suce, si tu veux, t’es gentil...

« j’tadore »

YN

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La fiction

Hier, j’ai rejoint Hélèna assez tard, vers onze heures et demi, elle était déjà assoupie, et je l’ai réveillée, on s’est disputé. – Heureusement ! – Je suis rentré chez moi : j’avais laissé deux bougies allumées, une s’était consumée, mais l’autre avait roulé sous un tas de vieux journaux, de vieilles découpes, et elle brûlait la flamme encore entourée par le verre qui s’était à moitié cassé… J’ai regardé la flamme, très belle, très forte, et j’ai pensé au feu…



Je vais dire la vérité à Hélèna. Je vois ce qu’il va se passer, on a réussi à vivre pendant ces vacances d’hiver – parce que nous ne faisions que ça : s’aimer agréablement en ayant limité la casse éventuelle : ni voyage ni virage ni décision personnelle, mais du vis à vis. À présent je vois qu’on ne va pas se voir pendant des s’maines, incapables que nous sommes de nous intéresser à l’amour, cette chose pourtant la plus simple et nécessaire du monde. Cette chose du monde... Eh bien, je vais dire la vérité à Hélèna, que si je rencontre une autre femme pendant cette période, je me considérerai comme libre. Ceci à cause de l’ennui de ma vie. Je me suis tellement ennuyé toute ma vie, cette masse d’ennui. Chaque fois que je trouverai le moyen de m’ennuyer moins, je le ferai. C’est une résolution de la nouvelle année !






Le blog

La dispute, c’est ça :
« Tu m’as apporté l’article de « Danser » (sous-entendu : comme je te le demandais) ? – Non, mais j’en parle dans l’blog. – Le blog ! Alors, maintenant, ce n’est même plus mon blog, c’est carrément le blog ! – Qu’est-ce qu’i’ t’prend ? – Eh bien, j’en ai marre, je dois te dire que j’en ai marre ! Je n’aime pas du tout quand tu parles de l’odeur de pisse au bout du sexe, je trouve ça vraiment… ça me dégoûte, je ne vois pas pourquoi, moi, je serais dégoûtée comme ça, ça ne m’intéresse pas… (Ici quelque chose où je balbutie le mot… où je parle peut-être de « ma » nouvelle ou de « la » nouvelle…) Ça, une nouvelle ! Ah, mais c’est pas une nouvelle du tout, ça n’a rien à voir avec une nouvelle ! – Mais c’est toi qui l’as dit… (En me souvenant des moments heureux, c’est à dire d’une voix déjà très affaiblie.) – J’ai jamais dit ça ! Une nouvelle, c’est une œuvre de fiction, point final, c’est ce que j’écris, moi ! D’ailleurs, y en a une qui t’attend sur la table basse du salon. – Mais c’est de la fiction… Y a pas un détail de vrai, tout est changé, tu sais bien… (Voix presque éteinte. Puis départ en catimini – du salon – vers la respiration, la rue de nouveau, la neige noire, l’habitude.) »

Si Hélèna ne me lit plus, reste Pierre…

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« Danser »


Photo de Laurent Goumarre pour le magazine « Danser » (janvier 2009).

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