Monday, October 05, 2009

Ecrire

Les enfants comprennent très bien ce que c'est que le mouvement. Si ça bouge, c'est vivant. Le sable ne l'est pas, mais la mer, oui. La mer est vivante. Pierre m'avait demandé si le sable était vivant, je lui avais demandé en retour ce que ça voulait dire, pour lui, "vivant" : "C'est quand ça bouge." Il ne lui serait, en effet, pas venu à l'idée de me demander si la mer - ou les nuages - ou la rivière - ou le feu - étaient "vivants". Pour le Musée de la Danse qui (vous l'avez bien compris maintenant) est pour le moment un musée vide, immense comme l'univers, en quelque sorte, nous accueillions les visiteurs, à Saint-Nazaire, avec ces questions. Ce que l'on pourrait mettre dans un musée de la danse. Une petite fille intimidée par l'espace - ou par mes bagues - m'a dit (ou par l'intermédiaire de sa mère) : "On pourrait attraper des papillons." Et un petit garçon à qui Boris Charmatz demandait ce que pouvait bien être le pire mouvement : "Le pire mouvement, c'est écrire."

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Parmi la foule amassée

Frédéric Teschner m'a proposé de faire un livre avec lui. Ça s'est passé au Café Beaubourg tout à l'heure - nous avons nos habitudes - devant (ou après) un tartare poêlé et un verre de Sauternes rouge. C'est très beau, ce qu'il fait, je me demande comment je vais écrire ça. En sortant d'avec lui je ne pensais qu'à ça, tout y entrait, mais déjà ce soir la distraction de mille choses crée l'inconscience. Or l'inconscience est bien, mais sa propre voix... C'est à dire le temps - qu'est-ce qu'on en fait du temps ? Frédéric Teschner m'a dit qu'il a pensé à moi parce que je travaillais, comme lui en quelque sorte, avec le collage. Mon psy, en effet, me l'a reproché, "Ce que tu fais, c'est du collage !" Ma propre voix... Mais, là, il s'agit de la voix de Frédéric, il faudra que ce soit son livre (et ça le sera évidemment), il faut trouver le dispositif de l'efficacité. Est-ce qu'il faut systématiser le collage - ne mettre que des citations ou noyer les citations dans le vin ? Ça va sûrement se faire par Internet, mais ce qui serait mieux, c'est de se retrouver ensemble hors de Paris pour une semaine ou un peu plus, comme en studio de production, mais, ça, ça ne pourra pas se faire... Il y a une page, celle de droite, remplie d'une image, les pages de gauches sont encore blanches, il voudrait du texte... Les images dont il m'a montré quelques exemples sont très belles. Ce sont des superpositions de deux images, celle du fond est toujours la même, il s'agit d'une tache d'huile très étrange qu'il a photographiée dans son parking entre une voiture et une moto. Dans cette tache apparaissent d'autres images, parfois des anamorphoses... Comment faire en sorte de faire entrer le hasard dans le rapport entre les textes et les images, lui disais-je maladroitement, banalement, puisque c'est toujours la question quoi qu'on fasse, dans le champ artistique en tout cas, le hasard ou l'inconscient, ou les correspondances ou le désir, quoi qu'on l'appelle... J'ai oublié de lui dire que j'aime les clichés, les niaiseries (Rimbaud...), mais je pense qu'il sait. J'en recopiais quelques-uns (pour ses images) dans la salle d'attente d'un quelconque médecin : Une parenthèse de poésie, Sincérité désarmée, Parmi la foule amassée, mais la phrase qui restera peut-être pour le livre est celle qu'il (lui, Frédéric) a prononcée à table au Café Beaubourg : "L'art est mort depuis pas mal de siècles maintenant."

Le papier de Gerald Siegmund

Hier au Life de Saint-Nazaire, le Musée de la Danse a ouvert ses portes. Le Musée de la Danse est un musée temporaire et imaginaire dédié à trouver des possibilités pour valoriser la danse.
Dans le vaste espace, le public était invité à ajouter des gestes et des danses au musée, faisant du musée un événement live et performatif.
Parmi les visiteurs étaient Pauline et Stéphanie, deux jeunes filles de Saint-Nazaire qui ont enrichi la collection imaginaire du musée avec leurs danses japonaises.
Habillées en rose bonbon et bleu, aux cheveux noirs, les deux résidentes de la ville portuaire ont charmé et ensorcelé le public avec leur façon de danser. Tout à fait authentiques et "chez soi", elles ont présenté leurs danses des figures manga qu'elles ont apprises de l'Internet. De cette façon, elle ont démontré que le Musée de la Danse pouvait être un lieu pour les phantasies et souvenirs.

Gerald Siegmund

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Une fille très, très malade

Une fille très, très malade

Je n'ai pas la force d'écrire, je suis fatigué, j'ai vu mon psy (mais je n'ai pas le droit d'en parler - d'ailleurs je n'avais rien à lui dire à part lui demander s'il connaissait quelqu'un à New York pour mon filleul de neuf ans, il ne connaît pas, il connaît quelqu'un qui est à la retraite dans l'Etat de New York (mais ça n'a rien à voir) qui connaîtrait peut-être quelqu'un, mais il m'a dit rapidement "Parlons de toi, qu'est-ce que tu peux me dire sur toi ?" - parler de moi je n'en ai pas la force - et j'aimerais être plusieurs, c'est ce que je lui ai dit, j'aimerais être plusieurs en moi comme j'aime qu'on parle de Nicolas Sarkozy dans Le petit journal de Canal plus : "Ils sont plusieurs, là-d'dans."

Alors je lis sur Internet des articles à droite à gauche, toujours les mêmes sujets qui reviennent, je veux dire les sujets qui m'intéressent : Marilyn Monroe (une fille très, très malade) ou Venise (une ville...), la beauté, la mort, la dépression, l'art, la décadence, l'eau...



(Régression)

J'ai la chaleur, j'ai le cœur, l'électricité dispense le foyer nécessaire, l'hiver est dehors, j'écris sans réfléchir, j'ai des bottes, des bottes de cuir, l'année dernière j'étais avec une femme, l'année dernière j'étais à New York, l'année dernière j'étais à Saint-Nazaire, mais j'ai la chaleur, j'ai le cœur, il n'y a pas d'art, pas de surveillance, je ne suis ni bon ni mauvais, le chien aboie, les bouleversements climatiques, ce qui a déjà été écrit, le gros m'a insulté, c'est le contraire : j'ai voulu insulté le gros, Chicago n'a pas eu les Jeux, Marilyn ne parle pas anglais, je n'écris pas, je ne me souviens pas, je ne cite pas, je ne prends même pas la peine de me souvenir de Jean Renoir, pourtant cette citation l'avait intéressé, il avait soulevé la paupière dans ma direction, je m'étais dit que c'était dans ce sens que je pouvais (peut-être) travailler avec lui : amener des citations de Jean Renoir - ou peut-être de gens genre Jean Renoir - qu'est-ce qui lui plaisait dans cette citation ? - la citation disait qu'on ne peut pas connaître le sens d'un travail avant de l'avoir terminé, que les plans n'existaient pas.

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We this moment knew

"We this moment knew - Love Marine and Love Terrene - Love Celestial too", wrote Emily Dickinson.

La danse, la danse marine, la danse terrienne, la danse céleste aussi.

Au Life la beauté n'était pas nommée, la beauté est apparue parce qu'elle n'était pas nommée, c'était l'expo zéro, c'était le musée vide, le musée des vides, le musée de la danse, le musée de la guerre et du volatile. Un décor de contraste. Et les gens, ils se sont mis instantanément à faire des couronnes - c'est une position classique des bras - instantanément dans le ciel - et puis dans l'eau. Janez Jansa proposait la terre, mais sous le sol du l'immense hangar du vide, c'était la mer qu'on entendait, dont on sentait, comme disait Raphaëlle Delaunay, la "biorythmie". Janez a dit que c'était la même forme, que ce soit en l'air, dans le ciel, comme en danse classique, ou au sol, dans l'eau, dans la matière, comme en contemporain. Puis comme sur un radeau, l'immense radeau de la guerre, de la poussière, de l'esclavage et de l'enfermement des animaux, à contre-jour et à contre-jour de tous les yeux, Raphaëlle a dansé comme une star, une étoile, Marilyn.

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Juste une photo de moi au festival ActOral cette année


( "Les Inrockuptibles".)