Tuesday, November 03, 2009

The architect


(Torrance Goh.)

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The robots of dawn

(You are now running on reserve battery power)

Je suis bourré. Dois-je écrire, mes amis, dans cet état ? Il faut que je vous raconte des trucs ! Bon, la journée, c'était discussion toute la journée dans une salle climatisée. Mais, bon, ça va parce qu'il y avait Internet donc je pouvais me distraire en écoutant vaguement les autres (chacun expliquait ce qu'il faisait). Maintenant je suis bourré parce que la serveuse absolument charmante comme tout le monde ici a dit que c'était happy hour, que tout était très peu cher, enfin c'est ce que j'ai compris, elle m'a demandé si je voulais juste un verre de bière ou bien une bouteille (dans un seau à champagne), je me suis dit : si ça vaut rien, pourquoi pas, j'en donnerai autour de moi, et, hop, en veux-tu-en-voilà, vingt-sept dollars ! J'aime pas dépenser donc j'ai bu (car tout le monde en avait assez). Les gens me demandent toujours ce que j'écris dans mon carnet (souvenez-vous, le gros carnet de Pour en finir avec Claude Régy), mais j'écris mon diary, c'est simple, et j'écris pour vous, mes petits amis, Thomas Ferrand, Christophe Atabekian, Frédéric Teschner, Jocelyn Cottencin. J'écris pour les garçons hétéros qui sont ceux qui m'intéressent vraiment. Je sais, je ne me grandis pas en disant ça (mais je suis bourré). Boris me demande combien de lecteurs lisent mon blog. Mais Heman (que je nommerai Jeremy toute la soirée), le plus malin de nous tous, dit qu'on ne peut pas savoir qui lit les blogs, combien de personnes, parce que there're too many robots nowadays. Heman Chong est un Chinois plasticien qui travaille ici, enfin, un peu partout, très smart. Son travail est immédiatement intelligent et ludique. Il est comme un singe et il aidera à sauver les singes probablement. Ce que je vais raconter vient de lui. Il nous emmène après le bar dans un restaurant japonais à quelques mètres. C'est lui qui choisit les plats qu'on partage. On parle de l'Asie en général, des différents mondes. Il dit que, même pour lui, Asia is weird, c'est un peu a parallel world, il dit qu'en Asie, les choses sont plus différentes d'un pays à l'autre qu'en Europe. Comme il est straight, il est celui qui m'excite le plus évidemment, les gays sont mignons, mais on dirait des poupées. J'ai senti ses grosses lèvres pressées contre les miennes parce que comme il a insisté pour payer et qu'il était définitivement, en faisant ça, dans une domination mâle contre laquelle on ne pouvait rien, je lui ai dit en me levant et en faisant le tout de la table que pour cette raison "you deserve a French kiss in public". Nous sommes en terrasse près de la rivière et je rappelle que nous risquons la prison à vie. C'est écrit. Personne ne nous a vu, je pense, ç'a été rapide, sauf l'exception, toujours, pour les crimes : une serveuse (sans doute), une femme que j'ai vue immédiatement disparaître derrière une porte. Ici, il y a plein d'éclairs tout le temps. Oui, il faut parler de la pluie ici parce que, ça, c'est génial. C'est très science-fiction. Il fait très chaud et il y a plein d'éclairs silencieux toute la journée. Et puis il y a ces averses, ces orages incroyables, sans conséquence. Les hommes et les bêtes vont aux abris, c'est normal, ça dure une heure ou deux et ça repart ensuite, l'été, le bonheur permanent. Après, les flaques, les puddles, elles sont chaudes, quand on marche dedans en flip-flop. Ça fait du bien, l'humidité, c'est même que ça, ici, qui nous rattache à la nature des choses parce que sinon, à Singapour, tout est fait pour être uniquement mondial, ressembler à tout ce qui pourrait être mondial. Global, comme on dit. En un sens, ils ont raison. Au point où on en est, autant faire science-fiction. Mais, enfin, faudrait sauver les animaux et les plantes. Ici il y a des réserves. C'est ce qui se profile : des réserves. C'est horrible ! On a du mal à imaginer que cette rivière qui n'est plus qu'un affreux canal bétonné et traversé, à l'endroit où nous sommes, d'un pont comme gonflable, inflatable, comme un mauvais Jeff Koons, était, il y a encore dix ans, la rivière profonde de Singapour, le port profond de Singapour où l'on déchargeait le riz dans ces hangars dont ne subsiste que celui qui abrite le théâtre sans nom qui nous accueille (ou vice-versa : qui accueille le théâtre sans nom qui nous abrite). Une ville en dix ans s'est construite n'importe comment. Que du béton, que du chic cheap, mais très enthousiasmé. (Vitaminé, dit-on ?) L'Etat ici fonctionne comme une company : ils prennent vos taxes et ils investissent, ils sont de good businessmen, no ideology. No one in South Asia likes Singapour. Comme la Suisse en Europe. On hait cette mentalité sans vergogne. Morale du fric pur, du fric blanc. Je détache les baguettes en bois l'une de l'autre, au petit bruit de déchirure, je remarque encore un peu la nature. Je demande à Heman si les Européens que l'on voit à Singapour sont là pour le sexe ou pour les affaires. "Pour les deux, me répond-il, puisqu'ici la prostitution est légale." Il y en a des rues entières, un quartier un peu comme à Amsterdam, des vitrines. Heman veut nous emmener voir le musée de l'Enfer, une chose incredible qu'il ne peut même pas nous décrire, ça ne ressemble à rien. Des sculptures représentent l'enfer, une centaine d'ouvriers ou d'artistes ont dû travailler dessus. C'est grand, sur plusieurs niveaux. Ça fait penser à Dante, bien sûr. C'est une chose datant des twenties, commissionnée par le type qui a inventé le Baume du Tigre... Il y a aussi le Night Safary dont tout le monde parle. C'est le zoo, mais ouvert la nuit pour pouvoir voir les animaux qui y sont actifs. Ici où nous sommes, c'est un endroit sans kids, mais Heman dit qu'en banlieue, il y en a quatre pour un (adulte). Bon, ça m'a débourré de recopier tout ça sur mon ordinateur. J'espère que j'ai pas dit trop d'bêtises... (Comme j'avais dit à mon psy la fois où j'y avais été perché.)

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Ok, tu es un guide de L'Expo zéro, c'est ce qu'il faut comprendre. Les gens vont voir à travers toi le vide du zéro, de l'expo et du futur, une expo qu'un enfant adorerait : le vide pour s'y précipiter. "A room where you're free to think what you're going to do." (Robert Barry). Ce que nous faisons dans L'Expo zéro, nous le faisons dans la vie. L'amertume et la vie. La vie, le conservatoire de la vie. Bien sûr les réserves des Indiens puisqu'ils ont été exterminés. Dans cinq ans, dans dix ans, il n'y aura plus de singes que dans les zoos. C'est ce qui est expliqué au zoo de Singapour qui est très beau. Au musée de Singapour qui est son zoo, il y a aussi cette phrase (...) d'un chef Indien : "If all the beasts were gone, man would die from great loneliness of spirit, / For whatever happens to to the beasts also happens to man / All things are connected. Whatever befalls the Earth befalls the sons of the Earth." Aujourd'hui, l'ethnologue Claude Levi-Strauss est mort, mais ce n'est pas très intéressant, ce qui est intéressant, c'est qu'il avait cent ans. Comme la princesse au bois dormant, cent ans. Que vont être les cent prochaines années dans le noir du vide et de la fin du monde ? Où sera la danse si les animaux - dont nous faisons partie - ne seront plus là pour la danser ? Le musée de la Danse doit-il être le musée de l'Amertume ? "This perfection could become a trauma."

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A quoi pense Roman Polanski ?

"Hors la matière, tout est musique : Dieu même n'est qu'une hallucination sonore."






A l'hôtel, on ne peut pas ouvrir les fenêtres et les vitres sont très sales. Je ne peux pas écrire bien vite parce que j'ai la main droite paralysée. Je me demande si ce n'est pas d'avoir vu ce film, Le Scaphandre et le papillon. Dans le film, le héros croyait que ce qu'il lui était arrivé était arrivé parce qu'il avait voulu réécrire Le Comte de Monte-Christo au féminin, la vengeance d'une femme. Je me suis réveillé après avoir dormi dans des postures invraisemblables et ma main était paralysée, je n'sais pas pourquoi. Ankylosée, j'ai cru au début, mais ça ne guérit pas du tout. C'est flippant. Je passe alternativement du "je m'en fous, c'est un aléa" à l'angoisse. Je pense à Pierre. Il serait déçu que je sois encore plus amoché.
Pendant que j'essayais le peignoir et les slippers de l'hôtel, un merle* s'est mis à chanter. Cadeau invraisemblable, j'ai cru d'abord que c'était un dispositif de bienvenu dans le mur qui se déclenchait (un dispositif sonore). Mais non, il était là, magique, sur une sorte de corniche. Je l'ai observé longtemps avec ses pattes et son bec jaune, son chant magique. C'était donc encore possible qu'il y ait des bêtes dans ce dispositif de mort de la société mondiale... Un espoir, c'est peu de le dire... Mon merle. Il a arrêté de chanter un moment pour faire sa toilette. Est-ce que ça rentre dans le Musée de la Danse, ça ? Il est noir pur tandis que je suis en blanc (bathrobe et slippers), mais à l'instant où j'écris ça d'une écriture difficultueuse, il s'envole et me laisse voir le liseré blanc de sa queue ouverte. Je t'aime.






*En fait un mynah (mainate), il y en a plein en ville, je leur donne à manger. Ils ont une voix adorable. Les merles existent aussi.

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Thirst day














(François Chaignaud.)

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Hum, hum...

Hum, hum, j'ai bien peur de commencer à écrire. J'ai déjà beaucoup écrit dans ma tête toutes ces heures à l'aéroport. Maintenant, l'avion vient de décoller et c'est parti pour une journée de voyage presque. Le Boeing 777. Non, si je parle comme ça, si je décris simplement le voyage, je vais m'arrêter bientôt. Non, il y avait plein d'autres choses quand j'écrivais dans ma tête. La fameuse voix off. On est maintenant au-dessus de Fontainebleau. J'ai acheté un gros carnet pour ce voyage, c'est agréable de retrouver ces gros carnets que j'utilisais jadis, du temps de Pour en finir avec Claude Régy. Dans le magazine, Lætitia Casta "apologises profusely". Je pense que le roman que j'écrirai trouvera son ralentissement dans le fait qu'il sera en langue anglaise. Mais je suis entre deux femmes qui toutes les deux se mouchent - sans se connaître. Je pense à LAGRIPPA qui ne voyage qu'en avion (c'est connu). Il y a des choses sur la peur dans "Libération", la peur du déclassement et un débat sur la peur et l'angoisse entre philosophes, des pages et des pages sur la peur, c'est assez effrayant et ces deux malades autour de moi, ces deux malades qui m'environnent... Si c'était dans l'métro, j'aurais immédiatement changé d'place et, là, je suis bloqué pour vingt-quatre heures. Aussi, j'ai commencé à regarder Le Scaphandre et le papillon, le film de Julian Schnabel. Là aussi, c'est effrayant ! (Ma voisine, la malade de gauche m'a dit que c'était un très, très beau film.) Ça commence, un type sort du coma, il a la voix de Mathieu Amalric, mais il ne peut plus faire qu'une chose : cligner de l'œil. On va dans un pays qui représente l'horreur. On dit que Singapour est un peu la Suisse de l'Asie. La Suisse, vous voyez c'que c'est ? C'était déjà l'horreur avant Polanski. Alors, là, on est passé au cauchemar intégral, au feu brûlant. La Suisse, c'est l'horreur. A Singapour, il est écrit (dans le guide) qu'on peut avoir une amende (sévère) si on mâche du chewing-gum dans la rue ou si on jette par terre son ticket d'métro et même sans doute s'il tombe par inadvertance. A Singapour, il est précisé dans le guide que l'homosexualité est réprimée de peines allant de dix années de prison à la mort, "rarement appliquées", est-il précisé-précisé. Et les filles se mouchent, se mouchent. Comment peut-on prendre l'avion dans cet état ? C'est de l'inconscience à l'état pur ! Celle de gauche (la moins malade, peut-être) regarde Coco avant Chanel et il y a Emmanuelle Devos que je n'aime plus du tout depuis qu'elle a modéré son soutien à Roman Polanski. Je vais tuer ces filles qui se mouchent avant la fin du vol ! Ils auront une bonne raison, les Suisses, de m'arrêter à ma descente d'avion. Je suis comme ça, moi, la peur du gouffre et alors : m'y précipiter. Boris Charmatz m'a demandé tout à l'heure si j'avais réfléchi à un concept. Mon Dieu ! Il faudra que je lui dise carrément que le concept et moi, ça fait deux. Je n'ai même pas rendu le texte d'intention qui était demandé avec insistance par Martina. Parce que le contresens absolu, c'est de croire que ce que je fais repose sur un concept, c'est le plus grand danger pour la perception de mes spectacles - ou de ce que j'écris ou de ce que je vis, c'est me tuer. Mette Ingvartsen est très jolie. C'est joli de voir ces amoureux prendre l'avion, c'est émouvant. Très belle, intelligente, elle n'a pas trop aimé mon spectacle, mais je m'en fous, elle est classe ! (C'est pas comme Frédéric Danos, hier au soir, lui, il s'est complètement déclassé.) Ah ! Ça y est ! On en vient à l'évocation du "Elle"... Le malade était, en fait, editor au "Elle". Hélèna m'avait tout raconté. Et ça coïncide avec l'arrivée du repas, tout va mieux. Je suis inquiet parce que j'ai déjà mal au dos. On vient à peine de commencer ce voyage d'une journée. Ma voisine la plus malade (mais la plus jolie) prend du jus d'orange. Bien sûr, elle a besoin de vitamines, mais elle ne sait pas que les jus de fruit sont mauvais pour le rhume. Ah, l'humanité qui ne sait rien vraiment... A Singapour, il y a de très beaux parcs animaliers où les animaux "ont l'air heureux", est-il écrit dans le guide, "sauf l'ours polaire et le guépard", est-il précisé, mais, pour les autres (très nombreux), ça va. La Suisse des animaux. Au moins une chose à faire en ne jetant pas sa barbe-à-papa par terre. Elle se mouche, elle se mouche. Bien sûr avec le jus d'orange ! Je trouve qu'elle devrait arrêter de s'moucher, ça n'sert à rien. Laisser couler. Cette machine à morve. C'est pas sérieux, ce que j'écris. De la voix off, de la voix off. Je ne risque pas de faire des rencontres comme ça ! Je suis comme le héros du film, je ne cligne que d'un œil. Locked-in syndrome. Elle se mouche toutes les minutes, c'est possible ? On a un jour à tenir. Combien de minutes ? Et où elle va trouver ses mouchoirs ? Ceux qu'elle remplit, elle les coince dans une alvéole qu'il y a sous l'écran. Un nid d'microbes. Le vin n'est pas mauvais, "La Vieille Ferme", côtes du Ventoux. Le poulet aux épices et lait de coco aussi est délicieux. Un avant-goût. On mangera bien à Singapour. La Suisse de l'Asie est aussi sa capitale culinaire (selon le guide). Même en prison ? Je pars avec une chose agréable dans mon cœur : je sais que X m'aime - et, moi aussi, je l'aime. Il peut faire ce qu'il veut pendant que je ne suis pas là, c'est convenu comme ça, voir des garçons (j'allais dire des enfants), j'ai confiance. Il est beau en ce moment, il est fin (grâce à son régime dissocié) et il est vivant, il est intelligent, il est sensible, il n'a pas l'air malheureux en ce moment, c'est bien. Ma voisine vient de tousser, toux très profonde, très, très grasse. Je ne sais pas si elle va s'en sortir. Quelle idée d'aller à Singapour dans cet état ! Je me demande pourquoi elles y vont. Je me demande si j'oserai leur demander. Pour le moment j'écris comme le monsieur cligne de l'œil dans le film. On a survolé la Croatie, la Bosnie, la Serbie. C'est trop horrible : ils lui cousent l'œil ! Plus qu'un œil. Y a Emmanuelle Seigner dans le film. C'est horrible ce qu'elle doit vivre maintenant. On a donné du pouvoir à LAJUSTICE, mais LAJUSTICE, ce sont des hommes, des abrutis ! On a donné du pouvoir à des abrutis pour punir les autres, pour emmerder les autres. C'est insensé ! Il y a des gens qui ont le pouvoir d'emmerder les autres et ils sont payés pour ça et on les respecte pour ça et on les sacralise pour ça et, la vérité, c'est que ce sont des fous d'extrême-droite ! Tout ça avec la bénédiction du peuple mondial qui n'aime rien tant que d'aller vers la mort entraînant tout le monde et la terre si possible pour que ce soit bien fini, qu'il ne reste que les fourmis. Le peuple ne s'aime pas. Il se hait, il veut mourir. Il veut que la vie meurt, il veut entraîner et la vie et l'esprit. Emmanuelle Seigner est très belle, très, très belle. C'est affreux, le steward a proposé à ma voisine la comateuse de baisser les caches des hublots, "Comme ça, vous serez pas réveillée." Mais il est minuit ! Je ne suis pas claustrophobe, mais, quand même, je ne vois pas l'amélioration. Au moins on voyait la nuit, il y avait un extérieur, un espoir, un au-delà. Non, le coma intégral, intérieur. Il écrit des mots lettre par lettre. La fille la plus contre le hublot a voulu se lever. Les flash-backs sont dorés. C'est horrible, ce film, c'est trop émouvant ! Y en a un qui était otage à Beyrouth pendant quatre ans dans une cellule toute noire où il pouvait pas respirer. C'est N... A... Il y a une obèse dans l'avion avec un T-shirt : "I (un cœur) YOU." Elle s'imagine sans doute avoir le cœur gros comme son corps, c'est obscène. (Mot pris dans le film au moment où le héros dit : "Je veux mourir.") Elles continuent de se moucher, ces femmes, ça coule, ça mouille. C'est quand même affreux, ce film ! Si ça continue, je vais lire Frankenstein ! Vivement la fin ! Il fait très chaud dans l'avion, je me suis trop habillé. Déjà, à l'aéroport, j'avais chaud. Ça y est : j'éternue. ELLES m'ont passé leur saloperie ! Mon séjour est foutu. Un espoir, Jean-Do dit : "C'est pas compliqué, les femmes." Et : "J'ai décidé de ne plus jamais me plaindre", "Je viens de m'apercevoir qu'à part moi-même, il y a deux choses qui ne sont pas paralysées : mon imagination et ma mémoire." Est-ce que ça rentre dans le Musée de la Danse, ça ? "Je peux imaginer n'importe quoi, n'importe qui, n'importe où." Un moment très émouvant : il se fait lire des livres. Pierre, mon Pierre. L'autre se mouche, elle a des tonnes de mouchoirs. Quelle saleté ! Henriette* s'appelle l'orthophoniste. "Une mouche toute noire se pose sur mon nez, je me tortille la tête pour la désarçonner." "Nous sommes tous des enfants, nous avons tous besoin d'reconnaissance." Il y a une chanson de Tom Waits, à un moment (dont j'écoutais tout à l'heure la chanson sur Singapore**). "Zone de turbulence, sécurité, regagner votre siège, ceinture, etc." (Frayeur.) Je suis fatigué, je ne sais pas si je vais tenir cette journée sans dormir. Tout le monde a l'air de dormir comme des bienheureux. La populace. Mais ce film n'en finit pas. J'admire comment le cinéma transmet bien l'émotion. Hélèna m'avait raconté l'émoi au "Elle", le scandale parce que la maîtresse de Jean-Do (toujours au "Elle") avait le très mauvais rôle dans le film, tout le bien était laissé du côté de la femme. Qu'il est long, ce film ! J'ai sommeil. Niels Arestrup, son nom m'avait échappé tout à l'heure (l'otage). La grande malade à côté, celle qui avait fermé ses hublots, a laissé l'écran en lumière. On voit l'avion avancer peut-être au-dessus d'Israël, maintenant, ou du Liban. Ou la Turquie, c'est difficile à dire, les cartes changent tout le temps et les légendes sont en chinois. Jean-Do va mal, y a une crise... Ch'ais pas quoi, mais je m'en fiche ! Quel film, mon Dieu, quel film ! Et qu'est -ce qu'il fait chaud dans ce plane ! La Turquie, l'Arménie, La Syrie... Bagdad, Irak.






* Arthur Rimbaud :
"- La Juliette, ça rappelle l'Henriette,
Charmante station du chemin de fer,
Au coeur d'un mont, comme au fond d'un verger
Où mille diables bleus dansent dans l'air !"



**
"We sail tonight for Singapore,
We're all as mad as hatters here
I've fallen for a tawny Moor,
Took off to the land of Nod
Drank with all the Chinamen,
Walked the sewers of Paris
I danced along a colored wind,
Dangled from a rope of sand
You must say goodbye to me"

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