Tuesday, November 10, 2009

Poisson de l'hôtel


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Rudolf Noureev par Richard Avedon

Max

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Undesirable activities

J'ai mis mon verre
de vodka mandarine dans
le frigo et nous sommes
allés à la réunion au
Community Centre. Dans
la réunion, je cherchais
mon verre de vodka.
La réunion, il s'agissait
d'une manifestation.
En fait, un hôtel de
passe voulait s'installer
dans le quartier et les
habitants s'y opposaient.
Cette réunion mettait les
deux parties en présence -
avec vidéo-conférence - pour
exprimer les deux
points de vue.
La moitié de ceux
qui étaient là et qui
s'opposaient à l'hôtel
de passe étaient de
gentils couples d'homosexuels.
Gentils, jolis et intelligents.
Mais ils s'opposaient à
l'hôtel de passe.
Ce qui était curieux, c'est
qu'il s'agissait de l'Hotel
81
, hôtel qui, près du mien,
à Little India, est
indiqué, dans le guide,
comme accueillant les
homosexuels. Et il y a
cette loi, dont parle le
guide, punissant de mort
l'homosexualité. Visiblement,
cette loi n'est plus qu'un vieux
papier.

En fait, il apparaissait
que l'hôtel n'était pas
louable à l'heure, mais
pour trois heures minimum.
Une forme de compromis ?

Et puis, assez vite,
le même sentiment
me vient, dans cette
réunion, que dans
celles de Boris Charmatz
pour le Musée de la Danse :
A quoi bon ? Tout le
monde a compris, non ?
Si on rentrait manger
un morceau ? Eh bien,
non, il y en a que ça
passionne ! Et il faut
que tout le monde s'exprime,
etc. Et on répète les choses
mille fois avec tant
de concern ! Je ne suis
vraiment pas fait à ça, mon
Dieu, pédé ou pas pédé.
Mais j'en parlerai à mon
psy ! Comment devenir
un citoyen à part entière ?
S'intéresser aux autres. En
fait, c'est ça : les autres
m'intéressent pas du tout.
Je ne vois que des têtes
sur des corps, des "cailloux",
comme je disais, bien sculptés.
Que ces têtes de caillou
se mettent à parler ne me
paraît pas d'une émotion
renversante. La vie sociale.
Et tout ça dans un
vent de banquise parce
que les réunions, bien sûr,
sont toujours climatisées.
C'est terrible, la Suisse,
moi, je n'y crois pas.
Désolé, "je suis désolé".
Curieusement aussi l'adresse
de mes amis était aussi
un eighty one.
81 Tiong Poh Road.
La policy, la politesse incroyable,
la politique.
Mais je n'y crois pas.
David di Nota a raison, je
trouve, la politique, c'est l'
Afrique. Le reste est faux-
semblant.

I hope I made myself clear.
Thank you.


Cela dit tout le monde
avait l'air sexy, au bout d'un
moment.
Singapour, les premiers
d'la classe.
Quelqu'un a posé la
question : "Est-ce que nous
sommes bien en train de parler
de bus entiers de matelots
qui viendraient dormir ici ?"

Peut-être que ce qui
m'apparaissait étrange,
finalement, c'était que
tous ces gens qui se
comportaient comme des
Suisses (ou, au mieux, comme
des Hollandais) avaient,
pour moi, des physiques
d'immigrés. Quand je
réalisai ça, j'étais heureux.
Cette manière de parler
anglais comme des chiens
et d'en vivre comme des rois.

A la fin, tout le monde
était content. Le comité
de riverains a applaudi
les intervenants de l'Hotel 81
et mon ami français m'a dit
à l'oreille : "Maintenant,
c'est les bombes lacrymos !"

A la fin, les représentants
(de l'Hotel 81) sont partis
et quelqu'un, le plus âgé,
le sage et smart, a résumé
la situation et la soirée.

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Singapore Botanic Gardens



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Le désert

Le Raffles, le luxe et la peau douce, un garçon en robe,
un autre plus âgé, style espagnol, avec moustache,
celui qui est un peu rond a une toque de cuistot,
il y a, sur les tables, des casiers de cacahuètes, certains renversés,
il y a au plafond - ça, c'est indescriptiblement beau - des rangées d'éventails chinois en forme de feuille qui se balancent dans une vitesse de secret (celui qui a inventé ce système est un inventeur de mystère),
il y a un garçon à lunettes comme sorti de Harvard,
il y en a un à long cou, un peu boudeur, on dirait Julien

- et donc je commande le Singapore Sling, un cocktail rouge avec une cerise confite sur le rebord
- et j'attaque les cacahuètes

Qu'est-ce qu'ils se racontent, ces gros singes, aux tables réservées du Raffles Bar ?
Je me souviens qu'Hélèna n'aimait pas que je dise "les gens", "les gens, on en fait partie", disait-elle. C'est vrai, mais, quand même, je me demande ce que peuvent bien se raconter ces singes aux culs emboîtés dans les lourds fauteuils en rotin du Raffles. Quel genre d'affaire et de sueur ? Il faudrait lire Rudyard Kipling, Joseph Conrad ou Somerset Maugham ou Noël Coward...

En fait, ce n'est pas que les casiers de cacahuètes sont renversés, c'est que "les gens" jettent les coques vides par terre, ça craque sous les pas

Bon, allez, j'arrête les cacahuètes et je vous lis une phrase prise au hasard dans Cioran, Syllogismes de l'amertume (j'ai pitié de vous) :

"Que de tracas pour s'installer dans le désert. Plus malin que les premiers ermites, nous avons appris à le chercher en nous-mêmes."

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Le rideau

(Pour Bruno Perrament.)


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les hommes qui viennent
pour choisir les couleurs
passer l'après-midi
à ça

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Pour Aldo qui les collectionne


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correction (2)

à la température du corps
qu'ici, il n'y a pas d'obèse
budget taxis
d'oiseaux. A regarder




Ou ce qui l'est, mais qui est toléré.

Les policiers sont invisibles.

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Horny






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Philip K. Dick

La ville a l'énergie d'une rain forest. En vingt ans, tout s'est construit à une vitesse de plantes baignées d'eau et de chaleur, les tours comme des tiges, les lianes. Il y a du travail pour les architectes en-veux-tu-en-voilà. Milliers d'équipes, probablement. Il y a très peu de voitures sur les rubans mélangés, jamais d'embouteillage parce que les voitures sont très chères, surtaxées, mais des taxis partout toujours, très peu chers, et les transports en commun. Le "en commun", c'est ce que je ressens ici. Bien sûr tout le monde est content, tout le monde a du travail, tout le monde réussit. C'est multi-culturel. Il n'y a pas de corruption. Tout est interdit. Sauf ce qui ne l'est pas. Les policiers sont en civil. Il n'y a pas de crime. Dans une dispute, tout le monde sourit. Perdre ou gagner, c'est égal. Les visages sont très beaux sauf ceux des Occidentaux un peu aigris.



Je passe dans la forêt des espèces vivantes. Il y a une musique globale enregistrée, c'est celle des oiseaux et des cigales. C'est celle d'une installation de Claude Lévêque. Et ce que je vois, d'ailleurs, là où le banc est installé, c'est le grand orgue de science-fiction de l'arbre appelé 8. Je suis bien dans la rain forest. C'est juste ça : je suis bien. Mon corps est liquide et flotte dans l'air à température. Du corps imaginaire. C'est un chemin comme un couloir qui traverse la rain forest. Forêt reine. Poser le pied hors de ce couloir - personne ne le fait - écraserait un papillon. D'ailleurs, je suis seul dans ce couloir. C'est le couloir du temps. Le monde dont j'entends la rumeur est transformé en musique de cathédrale. Le monde à mon retour...



Une autre supériorité sur l'Amérique, c'est qu'ici il n'y a pas d'obèse. Sauf Bouddha himself.



Les orchidées se perchaient sur les arbres des forêts.



Singapour a les qualités d'une ville que je ne comprends pas. Qu'est-ce d'ailleurs ? Une île, un pays ? Bien sûr je progresse dans sa compréhension. Mais je vais perdre ce que j'aime maintenant. Être au carrefour et ne pas savoir où aller. Que me dit le mynah ? La grande ballade, c'est ça, avoir un budget taxi (ça coûte rien, mais comme j'en prends toute la journée) et sillonner comme dans un intérieur mental une ville vivante comme la rain forest.



Je passe devant le Ministry of Education, je pense à toi, Pierre.
Je passe devant le Montessori Kindergarten.
Et puis, la grande mode, c'est de construire des tours et de les relier par des ponts.



Il y a une manière de se déplacer à Singapour qui est lente comme dans la jungle,
un travelling d'oiseau,
à regarder les visages comme des sculptures,
plus proche de la pierre que de l'animal, l'homme,
cette masse dure de la pierre, ok, posée sur un corps.

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