Thursday, April 01, 2010

Journal d'un créateur, 2 avril

C'est difficile de parler d'aujourd'hui et - est-ce la peine ? - une fausse journée apparemment, une journée touffue, confuse - et je viens d'entendre Claude dire : "Bon, eh bien on va arrêter là, non ? Quelle heure est-il ?" Pourtant - et je le regarde maintenant - l'espace est toujours aussi beau, intact et surprenant. Pourquoi devons-nous y faire quelque chose ? Ce serait moi, je laisserais les éléments dans le désordre (comme l'a si bien décrit Olivier Normand à propos de Oh, pas d'femme, pas d'cri), les pierres non serties - mais Claude, apparemment, veut mettre les choses ensemble - et évidemment (et Dieu soit loué pour ça !) rien ne veut se mettre avec rien - bien entendu. La montagne est la montagne, mais, non, il y a aussi le lit, le monstre qui se réveille (il apparaît d'une trappe directement sur le lit, mais le mécanisme n'est pas encore monté), il y a aussi la petite fille (mais qui n'est pas là aujourd'hui), il y a le cercle des poètes, il y a Mary Shelley qui dans un long monologue parle de la mort de son enfant, il y a le panorama qui défile (mais comme la machine s'est cassée, il y a aussi tout un ensemble de machinistes qui la répare) et il y a la bête équarrie sur la table (pas la bonne table, mais la bonne bête), et les Célibataires, de nouveau trois, un nouveau vient d'arriver. Les Célibataires sont dans des costumes assez semblables à ceux qu'ils porteront au final. Ils sont en sous-vêtements blancs avec, souvent, des serviettes sur la tête comme pour se protéger du soleil, ils ont des barbes postiches qui demanderont chacune une semaine de travail à une personne qui va les construire poil à poil... Etc. Il y a plein de choses, en somme, plein de trucs et de la musique et de l'éclairage et des éclairs et du tonnerre (il y aurait) et tout ça me fait dire à Claude, à un moment : "Je crois que tu n'éviteras pas de faire un spectacle de série B, quand même, au final." Claude cherche, Claude semble lent (Hedydd lui a dit qu'en Angleterre, ce serait réglé en quatre semaines, tout ça. J'interviens pour dire qu'en France... (mais ce n'est pas juste, c'est trop facile...)) En fait, j'imagine qu'il va y en avoir pas mal des journées comme ça parce que, le spectacle, il faudra bien qu'il parle de quelque chose - et alors, de quoi ? De quoi qui n'est pas encore nommé ? Il faudra bien que quelque chose apparaisse qui n'est pas encore - déjà - nommé... Et beaucoup est nommé, déjà beaucoup. Alors quoi ? Série B ? Maintenant, j'entends encore Claude téléphoner et dire d'une petite voix douce : "Tu viens chez moi, ce soir, ou quoi ?" Eh, oui, c'est le week-end ! Mais la montagne, elle, reste pure. Un éclairagiste fait tournoyer de très sophistiqués éclairages de boîte (des Martin Mac automatisés) et le spectacle est parfait. Ce serait moi, j'enregistrerais les acteurs pour en faire une bande-son et je ne ferais en scène strictement que des images, voilà ce que je ferais, si c'était moi.

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