Wednesday, March 31, 2010

Silence de l'appartement-nuit


Photo Marc Domage. Hamlet.

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Belle du soir

"Jamais le culte de la poésie n'est davantage souhaitable qu'aux époques où les principes d'un égoïsme calculateur l'emportent de beaucoup."

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Journal d'un créateur, 1er avril

Aujourd'hui (1er avril), Roger m'a dit bonjour et prononcé "Yves-Noël", rien ne m'a fait plus plaisir ! Mais, plus tard, il m'appelle "Monster Man" et me palpe la cuisse comme pour vérifier qu'elle est en latex puis dit : "Ah, il n'est pas chatouilleux, au moins !" (avec l'accent de Bruxelles). Il dit encore : "Je pense être un peintre refoulé." Et Arié (vrai peintre) : "C'est embêtant, les peintres refoulés... Il y en a eu un célèbre..."
Ici, on s'embrasse qu'une fois, c'est très classe. Mais comme Byron m'embrassait deux fois ce matin, je l'ai embrassé cinq fois et tout le monde a vu que le monstre avait un feeling. L'atmosphère était soudain saturée de - comment les appelle-t-on déjà ? - phéromones. Rebecca sort à tout bout de champ des phrases comme : "Va te faire brûler en enfer, connard !" En particulier à Claude. C'est très drôle parce qu'il n'y a pas plus charmant que cette fille et qu'elle n'en pense pas un mot. Ou juste un peu comme doivent le penser les perroquets... J'entreprends de continuer son apprentissage (commencé par je ne sais qui). Elle apprend donc (qu'elle teste aussitôt sur Claude qui fait mine de me fusiller (au moins du regard)) : "tapette, tarlouze, fils de pute, enculé, trou du cul..." qui servent toujours avec cette phrase formidable :"Va te faire brûler en enfer..." Claude me supplie de ne pas lui corriger le "te" qui fait tout le charme... Peut-être, dans une leçon ultérieure, plus élaborée, lui apprendrai-je les insultes inventées par Thomas Scimeca pour l'opérette de Nathalie Quintane : "cul d'oursin, face d'angoisse, face de chips, face de Vico..." (avec l'accent de Marseille, bien sûr). Hedydd apprend à Claude une horreur pour qu'il puisse se défendre. Un truc vraiment sale, en gallois. Je rappelle qu'Heddyd et Rebecca sont, par hasard, originaires du même village du Pays de Galles. Elles ont pourtant été choisies à Londres parmi deux milles candidats. Claude m'explique comment ça s'est passé. On a envoyé une annonce sur un site Internet qui regroupe tous les agents de la place de Londres : deux milles réponses. On en a triées soixante (au pif, d'après photo) et on a auditionné les candidats pendant deux jours. Résultat, on a la crème de la crème, leçon de théâtre permanente, un quatuor, et, par hasard, deux filles du même village (dont je n'ai pas retenu le nom, mais je me renseignerai...)
A propos de hasard, j'y reviens parce que c'est tout de même formidable : Joseph qui joue Georges Byron s'appelle Hasard. En Anglais : Michael-Joseph Chance. Faut le faire, quand même ! Aujourd'hui, j'ai vu une partie de son charme (qui a sur moi beaucoup d'emprise) : il ressemble à Roman Polanski ! Ce matin, en tout cas, pas rasé, avec ses petits yeux précis traversant les limbes d'une forêt imaginaire en vue du plaisir à trouver, précisément sexuel. (A vérifier, bien sûr.) Chance meetings occur everywhere in the world. Les rencontres de hasard...

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Arié

"Oui, mais quand tu dis : "Mon amour était-il blâmable ?", est-ce que c'est une question que tu me poses ou que tu te poses à toi-même ?" Et Arié : "Ben, c'est vrai que je me la pose aussi à moi-même."

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Vanités

Roi déjà mort avant que de bégayer quelque lettre d'amour...

















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Dans la couche profonde de l'épiderme

Je suis dans mon inconnu comme dans ma région. Je traverse la campagne belge, de Bruxelles à Brugge. La campagne belge, elle n'est rien et, pour la rendre plus grande, le train va lentement. On dirait le déroulé du diaporama que prévoit Claude pour le voyage des romantiques. Tout est réel et tout est irréel. On peut dire que ce que l'on perçoit n'est pas réel puisque c'est ce que l'on perçoit - et que le réel est autre chose, c'est ça qu'explique la créature à son créateur. Le réel, c'est autre chose. C'est noir si la perception est claire et c'est lumineux si la perception est noire. C'est inversé (au moins). Titre : Season of light, season of darkness.
Mon visage trop grand pour être possible (p 29 FF)
Il n'y a pas de créateur. La création et le créateur sont une seule et unique personne, c'est ça l'horreur, le tréfond de l'horreur. L'homme s'est créé lui-même et s'est totalement raté et il n'y aura pas d'autre chance car il n'y a pas de créateur. Une fois l'homme détruit (et détruit dès l'origine puisqu'il est raté), il n'y aura pas d'autres hommes. L'homme en est si persuadé qu'il va essayer de détruire tout ce qu'il pourra avec sa propre destruction, les baleines, les thons rouges, mais jusqu'aux petites bactéries. Mort, face noire... Et, bien entendu, ce n'est pas la vraie histoire - mais juste une histoire.

La chasse commence dans la forêt et sous un ciel menaçant...

Frôler Brugge...

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A un nouveau monde de dieux et de monstres ! (toast)

Je dois dire que je ne dors pas. Mais je dois dire que je m'en fiche. Le sommeil, cet ami, me reviendra. En attendant, tout m'intéresse. Par exemple, vous savez, j'habite dans une chambre de bonne, à Paris, mais, là, j'ai un appartement-château (dont j'ai déjà parlé), voici une bonne raison d'y passer les heures éveillé. Je m'y plais.
Sur le chemin, je m'arrête au Pain Quotidien. Le chemin est assez long, mais il traverse le quartier des splendeurs de Bruxelles-village. Rue de l'Etuve qui mène à la Grand Place ou rue du Midi que je préfère, quartier Sainte-Catherine, place de Brouckère. Aujourd'hui, plein soleil, mais il venait de pleuvoir (à verse). C'était comme marcher en apesanteur au-dessus d'une piscine. (Et ce que je dis est butoh.)
La bête, on l'appelle "le cougar" parce que Roger le régisseur se vantait, le premier jour, de pouvoir nous mettre à disposition tout ce dont on rêverait, de pouvoir nous amener à peu près tout et n'importe quoi. Vous connaissez un régisseur comme lui en France ? C'est une question que je vous pose. Je lui avais demandé, pour ma part - immédiatement emballé par le personnage - de me rapporter dans la demi-heure un très beau cougar empaillé qui aurait été du plus bel effet sur le velours de la montagne noir de neige. (Claude trouvait aussi.) Mais il avait répondu : "Dans la demi-heure, c'est un peu juste, mais, dans l'heure, sans problème." Et, en attendant, Claude (usant juste d'un peu plus de pouvoir que moi) lui avait demandé de monter la bête équarrie du sous-sol. Dont j'ai aussi déjà parlé.
Roger me dit bonjour et s'excuse de ne pas se souvenir de mon prénom : "Ça va v'nir, ça va v'nir." Je l'autorise, en attendant, à m'appeler "le monstre" ou "la créature". Mais lui : "Je ne me le permettrais pas." Qui en France ? Dites-moi ! Dites-moi qu'il en existe en France. Chez Chanel, oui, il en existe, dans les Maisons. Mais dans un théâtre ?
J'ai même eu une idée saugrenue, je pense que Roger est si aimable que Marlène en serait folle. Je pense qu'elle l'aimerait tellement qu'elle pourrait l'épouser. Mais il n'est peut-être pas libre. Je vais me renseigner. Ou sa maîtresse.

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Sentimentalement luxueux

(Journal d'un créateur, 31 mars)



Quatre Belges installaient une table (pieds réglables) dans la lumière de la montagne de gouffre. Encore un spectacle de moi qui se perd. Des centaines de spectacles de moi créés et perdus au fur et à mesure de leur apparition, création permanente, bulles de champagne...

"I don't want anything. Things come to me."

...et les poésies de Keats, les pages gonflées par l'eau.
Sur une plage d'Italie, ses amis allumèrent un brasier pour faire brûler ses restes...
"A calcified heart, hard as a stone. Silence of your blood..."
Les Anglais disent au micro, en cercle, le récit de la mort de Shelley. Les voix sont pures, musicales, inédites, ouvertes et concrètes comme la bande-son d'un film inconnu. "What are you looking at ? What do you want from me ?", dit Georges Byron (il a aimé tant d'hommes et de femmes et par dessus tout le corps de sa sœur). Rebecca, comme Kate. Elle pleure - ils pleurent tous. Les acteurs dans leur jus.
On a beach in Italy. La musicalité de la langue anglaise est indescriptible. "I / laugh /and / know / not / why.", dit Byron en faisant comme des ricochets dans l'eau. "I have seen a thousand graves opened..." D'où je suis, une larme brille juste au bout du nez de Rebecca que je vois de profil. Il y a un cercle, un cercle romantique indeed. Les quatre Fantastiques. Thou sist at the hearth of pale despair.

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