Monday, January 17, 2011

Un portrait par Olivier Steiner


O S, d'après Patrick Laffont.



Yves-Noël Genod
17 janvier 2011


Il a besoin de toucher, il a besoin de fouiller.
Quand il le fait, quand il touche, quand il fouille, il révèle.
C’est plus fort que lui. Beaucoup plus fort que lui.
C’est comme ces enfants pas sages et trop curieux qui cassent leurs jouets.
Pour mieux voir à travers, pour voir comment c’est fait.
Pour voir comment réparer.
La première fois, dans ce café de bobos, rue du Faubourg Saint-Denis,
il m’avait demandé calmement, très doucement,
si j’étais une pute, si j’avais fait la pute.
Et calmement, très doucement, j’avais dit oui,
je ne pouvais pas dire autre chose que oui.
Son regard s’était alors rempli d’un sentiment vicieux,
puis innocent, du vif-argent.
Nous étions sortis du café, il faisait nuit.
Nous étions partis acheter des perruques,
comme ça, pour voir,
pour un spectacle, pour faire comme si.
Les perruques lui vont bien. Il n’est jamais ridicule.
Il y a trop de présence en lui pour laisser de la place au moindre ridicule.
Il est attardé dans l’enfance.
C’est un sale gosse.
Un mécréant.
Mais il ne faut pas s’y tromper.
Il est aussi fragile que les coquelicots sur le bord des routes.
Aussi commun, aussi rare, aussi voyant.
Avec lui, c’est « la pudeur des sentiments,
maquillés outrageusement
rouge sang ».
Mais « la peau est d’une somptueuse douceur.
Le corps. Le corps est maigre, sans force, sans muscles,
il pourrait avoir été malade, être en convalescence,
il est imberbe, sans virilité autre que celle du sexe,
il est très faible, il paraît être à la merci d’une insulte, souffrant. »
Duras et Gainsbarre.
Il est terrible.
Là où l’on croit le trouver, on ne le trouve pas.
Il est exactement le contraire d’un personnage narcissique.
Vraiment. C’est étonnant.
C’est étonnant ce faux-semblant.
Le premier qui lui fait du mal.
Désormais.
Je le tue.

Lolita

« Tiens, c’est marrant, cette nuit, j’ai rêvé de toi et, cette fois, je te raconte mon rêve. On est dans une zone industrielle. Je crois qu’il fait nuit. On va acheter des fringues Balenciaga, mais j’arrive pas à me le mettre dans le crâne, j’arrête pas de dire : « Balag(u)encia ». En te voyant, je me dis que c’est sympa que tu sois dans mon rêve. Tu me fais essayer des robes de princesse de gamine et j’ai l’impression d’avoir douze ans et j’aime bien. D’ailleurs je me dis qu’à douze ans, on aime exactement comme on aimera toute sa vie. On est dans un hangar plein de fringues et je viens t’embrasser et, toi, tu souffles, tu me souffles dedans, ça me fait un peu gonfler de l’intérieur, je passe en 3D et ça nous fait marrer. T’as une doudoune argentée, vêtement du futur pour aller dans l’espace. Ça t’irait bien. »

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La Solitude impartageable de la perception

« On peut pas échapper à la fiction. A partir du moment où on parle – et a fortiori où on écrit – on est dans la création d’fiction. Bon, c’est un peu de ce côté-là que s’est dirigé l’autofiction… »

« Y a pas « votre vérité », « ta vérité », non, y a la vérité sinon ça n’veut rien dire, tu vois, voilà, y a la vérité, y en a pas cinquante, y a pas… tu vois, non, y a la vérité et puis y a la capacité d’la voir alors y a tel « je » qui la voit pas du tout et y a tel « je » qui peut-être la voit, tu vois, peut-être que sa langue, peut-être que son récit, peut-être que l’obstination qui est la sienne va lui permettre de voir cette vérité. »

(Kierkegaard) « La vérité, c’est la subjectivité. »

« Tous les messages sont justes et l’contraire des messages aussi sont justes aussi. Simplement c’est la voix qui est juste ou qui l’est pas… »

« Il est certain que s’il y avait pas d’vie, il y aurait aucunement une nécessité de littérature. »

« Le réel banalement est le concret, la texture unique de l’instant, la solitude impartageable de la perception, l’inouïe simplicité du présent. »

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« Une intelligence de premier plan doit pouvoir fonctionner sur des idées contraires à la fois. C’est ainsi qu’il faut savoir que les choses sont sans espoir et continuer à les changer. »

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Alombre dune rose rose

Barbara, c’est quelqu’un qui n’a pas d’autre choix que d’être sa propre caricature, je veux dire qui a réussi à « être » sa caricature. Partie de rien (une voix, quand même, mais qu’elle perdra), elle arrivera à rien qu’à n’être rien, de passage, entraînant les foules, mais subsidiairement, enfin, parce qu’elle ne trichait pas. Elle ne trichait pas avec quoi ? Avec sa propre caricature, avec sa survie. Habiter une caricature, ce n’est pas facile car il faut la faire disparaître par l’émotion, la beauté – et que c’est toujours ramer à l’envers, toujours malentendus dans les relations h. (les relations humaines).

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Sa chance

Je me demandais qui était Stéphane Hessel dont l’apparition a été exceptionnelle au Grand Journal (Indignez-vous était chez mes parents, à Noël). Je tombe sur un ou deux articles critiques sur Internet, bon, très bien. Mais voici ce que je cherchais : Stéphane Hessel est le fils de Franz et Helen Hessel, deux des protagonistes, avec Henry-Pierre Roché, qui forment le trio de Jules et Jim. Le projet était de faire un livre à trois (ou au moins à deux ?) Il reste le roman de Henry-Pierre Roché et le journal d’Helen Hessel. Le journal d’Helen Hessel est l’un des plus beaux livres que j’ai lus. Stéphane Hessel parlait de son bonheur à Canal plus, il disait qu’il y avait cinq femmes dans sa vie. La première, sa mère, lui a appris à être heureux : « Si tu es heureux, tu rendras les autres heureux. » Sa chance.

Roi (mais c'est par gentillesse, Sylvie avait vraiment la fève)


Photo Stéphane Wargnier.

Viable, joyeux, plein d’espoir

« Vite et bien : deux fois bien. »

« Stendhal est heureux d’écrire son bonheur. »

« La société est tellement menteuse qu’elle fait comme si on attendait la création, mais c’est pas vrai. Flaubert n’a jamais été attendu, personne, Proust non plus. Ça a toujours été un combat. La littérature, c’est la guerre et la poésie, c’est la guerre. C’est vraiment une guerre et on la mène chacun avec ses forces contre une opacité sociale, « le gros animal », comme dit Simone Veil, qui s’en fout éperdument que vous écriviez ou que vous écriviez pas des livres, etc. C’est ça qu’il n’faut pas perdre de vue… Vous allez au numérique, à tout ça, bon, mais il n’faut pas perdre de vue que la faculté de réfléchir et de mémoriser perd de la force et que ça s’ra pareil pour la musique, la peinture et tout l’reste - et tout ce qui est l’art. L’art, c’est l’amour ou c’est la même chose, vous comprenez ? »

« C’est parce qu’il écrit que l’amour peut se produire, voilà. »

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« Qu’est-ce que ça veut dire ne pas être discrète, clamer quoi ? De toute façon, les gens clament pour moi. »

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J'ai marché dans l'amour...

« La société déteste l’amour. Le diable, si vous voulez, déteste l’amour. C’est-à-dire que ça choque, on n’est pas là pour ça, on est là pour exhiber ses relations. (…) Rien n’est plus prostitué et falsifié que l’amour. Deux personnes qui s’entendent (…), eh bien, choisissent immédiatement la clandestinité la plus stricte. S’ils ne s’y tiennent pas… »

« La société, toujours elle, construit toujours une image, vous construit une image parce qu’elle sent qu’il y a quelque chose qui lui échappe. »

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Hamlet enfant

« L’idée est venue de la lecture du livre de David Trueba, Ouvert toute la nuit, et de l’histoire du petit garçon souffrant du syndrome de Latimer, une invention de l’auteur où l’enfant se prend pour un adulte. J’aimais cette idée et j’imaginais comment un enfant pourrait interpréter un adulte au cinéma. »

« Ensuite, je suis allé voir Hamlet à Londres avec mon père. Deux choses m’ont frappé : la relation sexuelle entre Hamlet et sa mère, et le fait que l’acteur qui interprétait le rôle avait un visage de gosse. J’ai dit à mon père que j’aimerais faire un Hamlet avec un enfant de 9 ans. Dans la pièce, personne ne parle jamais avec le fantôme, hormis Hamlet qui n’a pas de témoins quand cela se passe. En sortant du théâtre, j’avais l’image d’un Hamlet schizophrène amoureux de sa mère et assassin de son père. Nous avons terminé la soirée dans un pub et cette vision du rôle me plaisait. Mais le lendemain, j’ai trouvé qu’en fait, la seule idée intéressante, c’était le Hamlet enfant. Moi-même, à 6 ans, je travaillais, je faisais du théâtre et je me croyais adulte. J’ai toujours prétendu être plus grand que ce que j’étais. »

« Rien ne lui va. Ni le pantalon, trop court, ni le pyjama, trop grand. Quand j’étais petit, j’avais des insomnies et la psychologue me disait : « Toi tu es trop grand, ou trop petit. »»

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« Si tu avances, tu meurs. Si tu recules, tu meurs. Alors, pourquoi reculer ? »

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La Fin de tous les spectacles

Avignon, le soir. Boire un coup avec Yves-Noël. Salle non payante. Durée courte : 30 minutes, ¾ d’heure en tout. J’offre du champagne et je lis un texte ou deux, jamais le même, je bavarde… C’est avant d’aller se coucher ou faire la fête, je joue au sage, je fais chronique. C’est à la fin de tous les spectacles. Ça n’a lieu que quinze jours.

Deux performances à Bruxelles les 25, 26...

Hey !!!
comment va ?
Et alors ? Comme ça on viens au pays de la frite bientôt ?!!!
C'est bien ça !
On se voit ? Un café ? Tu viens manger chez moi ?
On fait la fête ? ;)
En tout cas, moi, je viendrai te voir le 25, peut tu m'avoir une invite tu penses ? Dis-moi sinon je réserve.
Hâte de te voir en tout cas ! :)
Bon, à très vite en tout cas, porte-toi bien d'ici là !
Kiss
Jessica






Oui... (Je vais demander pour invite, mais j'imagine, quand même...) Ça va être en coup de vent, je sais pas ce que je vais faire, j'arrive le premier jour trois quarts d'heure avant et je repars tout de suite après (en hélicoptère), le lendemain, je passe la nuit (d'ailleurs où ? T'as une idée, t'as de la place ? Ce serait bien près de la gare parce que je repars à 8h) Mais, après, je reviens à Bruxelles du 31 janvier jusqu'au 18 février pour rêver un peu la future pièce du premier avril... Love

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Cher Yves-Noël,

J'avais perdu l'habitude de lire votre blog, j'y replonge ce soir avec plaisir !
J'ai beaucoup ri en lisant Choisy-le-Roi et Bourg-la-Reine, il n'y manque rien (à part les images), c'est parfait !

Au plaisir !
Amitiés !
Vincent






Ah, c'est gentil ! J'ai eu un peu plus de mal à l'écrire, ça, mais si vous me dites que ça vous a atteint, tant mieux ! C'est vrai que c'était comique, cette situation... (J'ai pas osé mettre les photos, c'était trop moche, quand même...) Bisous !

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« Un système ne peut pas se comprendre par lui-même »

Plein de nuit, plein de beauté, plein de ou d’absence de – virtualité
Il n’y a pas la violence dehors. C’est pas pareil. (Le blanc par exemple)
Oui, parce que c’est plein et réel et il y a quand même une reconnaissance
Et on n’est ni dans le feu ni dans la joie, on est dans le futur et c’est vide et long
C’est-à-dire, ça ne fait pas peur, c’est œuvre humaine
C’est-à-dire, c’est mon expérience, mon expérience…

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