Friday, September 28, 2012

Se plaindre ?



Est-ce que l’on ne serait pas foudroyé, à Paris, si l’on ne se plaignait pas ? J’ai envie de ne pas me plaindre (peut-être parce que je viens de m’enfiler une demi-tablette de chocolat,  voilà un médicament qui marche). Après tout, j’ai un toit, des livres. Internet. Je peux me balader partout. Il y a la nostalgie du réel, ouais. C’est vrai. La réalité, la 3D. Merveilleuse. Mais. La terre. Oui. La montagne. La mer. L’amitié réelle. L’amour (si ancien…) Qu’est-ce qu’elle a de pire, ma vie ? Non, alors je ne veux pas voir leurs mines de dégoût ou d’apitoiement. Plaignez-vous, vous aurez des amis. Ne vous plaignez pas, il vaut mieux vous cacher...

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Beauté de Bébé (2)


Baptiste Kubich. Photo François Stemmer.

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« Dans mes livres, il n’y a pas des bons ou des mauvais, il n’y a que des bons. » 

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Une scène de va-et-vient sur un lit



« A quelqu’un qui ne connaît pas le film, je le résumerais donc ainsi : c’est, une fois de plus, une tentative de description de l’imaginaire, et cet imaginaire est étudié comme dans un documentaire. C’est un film qui se refuse à séparer la vie réelle et la vie imaginaire. Je persiste à dire en riant que vie imaginaire et vie réelle sont aussi inséparables pour moi que le pommier de l’hiver et ce même pommier l’été. Il n’y a pas la pomme qui serait l’imaginaire et le pommier d’hiver qui serait le vrai pommier. Pour moi, c’est un tout. Ce n’est pas particulièrement neuf, cela se dit depuis six mille ans. »

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Sweet Dreams




« Le bon vieux temps qui passe, seconde après seconde et qu’on peut voir passer. »



Je regarde une vidéo de Catherine Deneuve. Et je pense : « la forteresse Deneuve », au moment où elle dit que, non, elle n’a pas le trac à descendre dans la rue. Bardot ne pouvait pas faire un pas dehors. Mais Deneuve s’est construite ce que j’appelle une « forteresse » qui fait qu’elle peut descendre dans la rue sans peur. Un char d’assaut. Et tant mieux, après tout. On n’est pas obligé de se griller comme des papillons aux lumières de la ville. Tant mieux si Deneuve peut encore avoir l’air d’habiter rive gauche et de faire son marché. Eurythmics  : « Some of them want to abuse you / Some of them want to be abused ». 

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« Le jour où l’équilibre s’établira entre ce qu’il est et ce qu’il dit, l’écrivain n’écrira plus. (…) L’écrivain est un menteur forcené, un imaginatif, un mythomane, un fou.  Il n’y a pas d’écrivains équilibrés. » 

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Le Snob de Marguerite Duras



Sieste. Audrey m’appelle au moment où je commencais à me toucher en pensant à Bébé. « Je ne te dérange pas ? » Je lui promets qu’on ira voir ensemble la pièce de Claude Régy – mais, alors, ça me volerait une soirée avec Bébé – et si nous faisions cela à trois ? Audrey et Bébé, je serais bien entouré. Une nuée. Mais Claude Régy ne m’a pas envoyé d’invitation, cette fois-ci. J’imagine que si je l’appelle… Je lis Sagan, les entretiens sont extraordinaires. C’est étrange de lire Françoise Sagan après m’être occupé d’Hélène Bessette. D’un côté l’échec, de l’autre le succès, phénoménal dans les deux cas. J’y pense soudain parce qu’à une question, « Qu’est-ce qui se seraient passé si vos livres n’avaient pas marché ? », Sagan répond : « J’aurais continué. » Voilà un point commun, Bessette, Sagan, deux écrivains, quoi qu’il se passe, écrire  jusqu’au bout. Bessette n’a pas cessé d’écrire, même après que Gallimard l’ait jetée, après la mort de Raymond Queneau qui la soutenait.

Wayne Byars interrompt son cours et se précipite sur moi : « J’ai pensé à toi, l’autre jour, parce que j’étais à un dîner et il y avait un type proprement insupportable… (J’attends la suite.) très religieux – et il a dit : « J’avais une amie, une très grande amie, une très, très grande amie qui était athée, on s’aimait beaucoup, mais je n’ai pas compris, à sa mort, qu’on lui ait donné une cérémonie religieuse (puisqu'elle était athée). C’était une très grande amie à moi, peut-être en avez-vous entendu parler... Marguerite Duras... » – Un snob. – Oh, mais alors, une ca-ri-ca-ture ! » Modèle à l’infini, à Wayne Byars, à moi et Jérôme Bel... (Qu’y puis-je,  si ce thème me poursuit ?)

Tout d’un coup, je me demande si Wayne Byars ne me parle pas de Michael Lonsdale, ce serait bien son genre… Dans ce cas, ce ne serait pas un snob. Michael Lonsdale est très religieux et Marguerite Duras était réellement sa très grande amie. Peut-être que son humilité religieuse le poussait à penser que les autres ne la connaissaient peut-être pas – en tout cas pas aussi bien que lui.

Je m’endormais pour la sieste les yeux ouverts et le soleil brûlant ; je me réveillai : le soleil avait passé et de bons gros nuages définissaient un gris d’été.

La faiblesse de Sagan : la drogue. Sartre ou elle ne concevaient pas d’écrire sans se droguer. Joris Lacoste. On le sent quand elle parle du plaisir d’écrire. C’est très intéressant. Mais elle en parle exactement comme d’une drogue. Vitesse, mécanique « bien huilée (...) l’esprit qui fonctionne presque en dehors de soi-même (...) C'est comme marcher dans un pays inconnu et ravissant. »

Dire quels livres on aimerait écrire suffirait à « faire un livre ». (Toujours cette rêverie.) « J’aimerais écrire des romans dans lesquels il y aurait de moins en moins de circonstances dramatiques, de plus en plus de vie quotidienne, de petits accrochages de chaque jour. C’est la seule direction, si je peux dire, que je voudrais suivre toujours. Parce que le drame est là. Les événements extérieurs sont toujours des accidents. Le drame, c’est de se lever, de se coucher, de s’agiter entre-temps et de se laisser glisser. Le drame, c’est la vie quotidienne… De temps en temps on en prend conscience, mais rarement... »

Bébé me dit que Rousseau lui fait penser à moi. Les Confessions. Je connais mal. Je lui dis que Duras aimait beaucoup Les Confessions.

Les femmes, cette disparition en creux du monde des femmes. Pourquoi ne pas sortir du thème – puisque Sagan l’a si bien traité – de la solitude ? 

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Beauté de Bébé


Baptiste Kubich. Photo François Stemmer.

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Qui aime bien châtie bien



Bébé m’a offert un livre, un truc sur le champagne. J’ai été déçu qu’il n’ait pas mis de dédicace. Mais il m’a dit qu’il y avait une phrase en exergue qui lui avait semblé valoir comme une dédicace : « A l’amitié, qui offre l’occasion de boire les meilleures coupes. » C’est vrai. M’a touché. On voulait rencontrer Sébastien, mais ça a loupé encore. C’est-à-dire qu’avant d’aller dans le bar gay où il se tenait, j’ai voulu boire du bon whisky. Alors on s’est arrêté au Madeleine-Bastille (quel nom improbable), juste à côté du Rex, ils avaient du Lagavulin. Il y avait un homme, assez âgé, qui ressemblait tellement à Marcus, j’aurais voulu que Marcus le rencontre, la même douceur, la même délicatesse… (Un homme qui servait, en noir et chemise blanche, très belle tête.)

Au café gay ou je ne sais quoi, dans l’enclave dessinée sur la chaussée par les barrières, nous rencontrons Benjamin Body qui dit immédiatement : « Mais c’est moi, BB. » Avec sa sœur, seule femme parmi la fin de l’humanité (et elle-même est lesbienne si j’en crois plus ou moins les allusions que j’ai captées). Benjamin raconte qu’il a un matériel sonore pour une pièce de danse qu’il n’a pas encore faite. Il a enregistré à leur insu plein de gens de la profession disant du mal des autres, ça fait un ensemble assez exceptionnel. Il me dit : « Toi aussi, tu balances pas mal. – C’est vrai ? Mais sur qui alors ? – Mark Tompkins et Christian Rizzo. – Ah ! ça va, alors. Je les adore. » Je me reconnais bien là : je ne parle que des gens que j’aime (que j’ai l’impression de comprendre), les autres, ceux que je déteste : pas un mot. Je suis rassuré. Je l’encourage à sortir sa pièce-bombe pour la profession. Que les ego se prennent des baffes, c’est toujours bon pour la santé. Le « je » est si manipulateur.

Je raccompagne Bébé chez Sébastien. Ils habitent pas loin, près de Strasbourg-Saint-Denis. Il faut passer la porte insensée, surtout la nuit – Georges Bataille –, c’est magnifique. Triste aussi. Je voudrais que Bébé prenne soin de lui. Je voudrais l’entourer d’herbe plutôt que de macadam.

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