Friday, March 01, 2013

Observant le visage d’une femme


C'est pas très grave. La qualité de ce spectacle est telle, je dirais : entre le rêve et la réalité, même si ça veut pas dire grand chose. Une troisième voie. Moi aussi, d'ailleurs, dans le travail de mes spectacles, en tant que metteur en scène, quand c'est bien, je n'ai même pas besoin de regarder, ça se sent. Mais j'étais plus près et, promis, la prochaine fois, j'ai mes lunettes !



« Nous pouvons faire vibrer la noirceur dans la lumière et la lumière dans la noirceur. »



« Ne recherche pas la sensation, mais la descriptibilité ; celle-ci s’accompagnera de la sensation »

Edmonde (aux Bouffes du Nord)



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Idéal moment


On m’a rappelé la période où tu m’aimais. Ça m’a manqué.. Nostalgie !
— Ah, je te comprends.. Mais fallait me donner un peu de sperme, quand même.. (Sinon ça s’appelle l’amitié.) Bises
— Si j’avais su !!!
— Ah, ouais.. Tiens, une jolie phrase qui fera sens pour toi, je l’espère : « Avec une belle inconnue : demain, à ne pas abandonner. »
— Oh, oui ! je prends.. Idéal moment.

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Pas facile de trouver un titre pour une photo pareille



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© 1980 by Les Editions de Minuit


Rauque la ville, c’est un livre, pour moi, capital, un livre que je compare, moi, pour moi, à La Maman et la Putain, quant à l’impact, quant à l’époque. Et ces époques molles qui passent si vite.. Mais il n’a pas eu le même impact, loin de là ! Mais il aurait pu ou presque pu. Pour moi, il l’a eu. Après, à grande échelle.. Il est désespéré, en tout cas, comme l’est La Maman et la Putain, mais son auteur ne s’est pas suicidé. Il vit toujours, mais il écrit des livres qui n’intéressent maintenant absolument personne (ou presque). Des livres que je ne lis pas non plus. Ecrire tellement écrire. Je n’ai jamais parlé de ça avec lui. Sauf, une fois, je lui ai dit : « Je me demande comment tu as pu écrire ce livre (Rauque la ville).. » Et il m’a répondu : « Je me le demande aussi ! », en riant. Je relis souvent Rauque la ville. Avec un éblouissement toujours neuf. Comme on peut revoir infiniment La Maman et la Putain. C’est par amitié avec Jean Pierre Ceton que je ne mets plus de tiret à son nom, ni de s à temp et à corp au singulier ni, maintenant, je le remarque dans Rauque la ville, trois points, mais deux points, en effet, ça suffit.. quand la pensée ne s’interrompt pas...  « de la terre réchauffée et de l’eau légère. Elle a fait une grimace. Je me suis assis au sol, près d’elle. En face d’elle, je l’ai regardée. Elle a dit : « je me croyais solide tu vois, maintenant je ne sais plus très bien.. Depuis des années je me fuis dans tout ce qui se peut.. J’écarte, à mesure du temp, tout ce qui me déplaît, tout ce qu’on voudrais m’imposer malgré tout.. J’ai tout rejeté ce que je m’étais fixé, parfois de façon très minutieuse.. Je vis désormais strictement au jour le jour dans ma pensée.. Souvent, je n’écoute plus personne.. je tiens à laisser ma pensée se penser... » Et plus tard, après un long silence qui ne m’a pas paru gênant : « .. tu vois, ça fait des années que je n’écoute plus ni radio ni voisin ni famille ni télévision forcément.. que je ne lis plus aucun journal ni revue de quoi que ce soit.. en somme que je me tiens belle au loin de toute sorte de nouvelles. » Brusquement elle s’est arrêté, me disant : « on n’a rien à se dire ? » J’ai dit : « non, non.. mais si, tu vois bien. » Elle s’est remise aussitôt à parler : « .. quand je vais dans les rues, je m’efforce de ne pas regarder.. ou de regarder ailleurs.. Parfois je ne mange plus, ou bien, quand je me sens faible, je mange des mixtures que j’élabore moi-même, et qui peut-être n’existent pas.. Mais depuis qq temp, à force de me jouer.. ah oui, tu ne comprends pas ? » Je n’avais rien dit, ne pouvais.. Elle disait : « .. au début.. oui, c’est une longue histoire.. Je jouais, oui je jouais à des jeux.. à ne plus faire.. ou à faire.. mais par désir bien sûr, oh oui, par grand désir.. Et ensuite, maintenant je le sais bien, j’ai joué de moi.. Et ce jeu, finalement, c’était se prendre de l’énergie à soi dans la mesure folle d’un enfermement qui s’est tellement accru que.. que je ne peux plus.. je ne peux plus parler avec personne.. Ni écouter quoi que ce soit de quelqu’un  sans que je déteste ce quelqu’un parce » (Page 80.)  « Qu’il est d’un autre monde.. », dit-on sur l’autre page. C’est le récit de moi. Le récit de mon désespoir à 18 ans, 17 ans.. Lyon, Villeurbanne.

Respirer



Je suis dans le calme, je suis dans l’après-midi, je suis dans le gris. Je lis, sans, pour une fois, m’abimer les yeux, des articles en petit sur le site de « Libération » et ça m’intéresse. Aujourd’hui réconciliation (physique) avec Felix. Ça m’a fait du bien. Ça calme. Retour-arrière. Noël. Ralentissement. La vie devient plus claire, plus lisible. Petite chose, ce Felix, petit bonheur, vaste comme le monde. Réel avec le monde. Se baladant dans le monde. Les mondes. Les trajets. Les dangers. Les réalités. Il joue en Inde, au Japon. Qu’est-ce qu’il joue ? Il joue. Il faut que j’écrive, il faut que je raconte, même de la petite fenêtre qui s’ouvre sur mon monde. Il faut que je témoigne. Même pour personne, même pour moi. « Tout voir, du moindre motif d’une robe à l’immensité du paysage. Et se dire à tout instant : tu peux faire mieux. (...) En fait, l’auteur d’un film devrait rester anonyme. Quand j’étais jeune et que j’allais voir un western, je n’allais pas voir un film de John Ford, j’allais voir John Wayne qui s’avançait vers moi à cheval. »



Une voiture me dépose aux Bouffes du Nord et donc, voilà, me voilà encore au bar du théâtre avec les acteurs de ce merveilleux spectacle que j’ai reconnu comme mien. Je discute avec cet acteur si intelligent, Vladislav Calard, il dit qu’il a travaillé sur l’air, sur épaissir l’air au moment du « jeu du raisin » (l’un des grains de la grappe de raisin est empoisonné). C’est une excellente idée de travailler sur l’air — c’est ce qu’il y a de mieux à faire. Je repense au solo de Laurent Chétouane pour Mikael Marklund à Avignon, immense et — fait que d’air. Laurent terminait son texte de présentation en disant : « Avec une belle inconnue : demain, à ne pas abandonner. » Parlé aussi avec Judith Chemla, la Callas de ce spectacle. Elle sait qui je suis maintenant, elle se souvient que je lui avait proposé du travail, la saison dernière, après l’avoir vue chez Martial Di Fonzo Bo, et on plaisante, elle habitait dans le quartier à une époque, etc. Mais — mais — il ne sera pas question que je lui dise tu (et elle non plus ne me tutoie pas), ça, non ! C’est peut-être elle, la comédienne à laquelle je dirais vous, c’est peut-être elle ! (comme Claude Régy disait vous à Delphine Seyrig).



Stanislas Nordey m’envoie 2 poèmes d’amour d’Anja Hilling. C’est magnifique. 2 textes magnifiques. Dernier déménagement (Der letzte umzug) et Tu es invention (Wosh). Ça m’émeut, en tout cas, vraiment. Je ne sais pas pourquoi, un ami qui n’a pas aimé Tristesse animal noir veut à tout prix que je dise que c’est nul — alors que, moi, ça me bouleverse. J’ai quand même le droit d’être bouleversé ! Et je me fiche de savoir si c’est une « vraie » ou une « fausse » écriture, moi, ça me bouleverse ! Et je le dis.

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Galerie Perrotin



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Notes sur la mélodie



J'ai toujours dans la poche ce livre que j'aime tant de Rilke. Notes sur la mélodie des choses...

VII 
Et il y a bien aussi des instants où un homme devant toi se détache calme et clair sur fond de sa splendeur. Ce sont des fêtes rares, que tu n'oublies jamais. Cet homme, désormais, tu l'aimes. C'est à dire tu t'appliques, de tes mains tendres, à copier les contours de sa personnalité telle que tu l'as perçue à cette heure. 

VIII 
L'art fait de même. Il est, oui, l'amour en plus ample, en plus démesuré. Il est l'amour de Dieu. Il n'a pas le droit de s'arrêter à l'individu, qui n'est que la porte de la vie. Il doit la franchir. La fatigue lui est interdite. Pour s'accomplir il doit oeuvrer là où tous - sont un. Et quand il fait don de cet un, alors survient à tous une richesse sans limites. 

IX
Combien l'art en est loin, cela peut se voir sur la scène, où pourtant il dit ou veut dire comment il considère la vie, non pas l'individu en son idéal repos mais le mouvement et le commerce de plusieurs. Or il s'avère qu'il place simplement les hommes côte à côte, comme on faisait au Trecento, et leur laisse à eux-mêmes  le soin de lier amitié par dessus le gris ou l'or de l'arrière-fond. 

X
Du coup aussi voici ce qui se passe. Ils essaient de s'atteindre avec des mots, des gestes. C'est tout juste s'ils ne se démettent pas les bras, car les gestes sont bien trop courts. Ils font d'infinis efforts pour se lancer les syllabes et, en même temps, ce sont encore de franchement mauvais joueurs de ballon, qui ne savent pas rattraper. Si bien qu'ils passent leur temps à se pencher et à chercher - tout comme dans la vie. 
...  

Je t'embrasse. 
L.

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Plus rien à se mettre