Tuesday, June 04, 2013

Nouvelles de l'Ouest parisien




Dominique Uber.

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Teaser : Damien Malige nous livre un extrait (de son second roman en cours)



Dimanche en fin de matinée nous nous sommes retrouvés à l’école de voile. Une table était dressée sous l’auvent pour partager un dernier verre. Le ciel était sans nuage, le soleil différent, peut-être plus ample. Sur la plage en contrebas quelques personnes pique-niquaient. Une dizaine. Les hommes jouaient au volley, les femmes discutaient sur un immense plaid aux motifs orientaux. Et bien qu'ils aient l’air sympathique, intelligent et cultivé, leur agencement rendait compte de l’attraction primitive, du vernis fragile de la civilisation. Les garçons avec les garçons, les filles avec les filles. Invariable. Rien n’allait de soi, il suffisait d’un ballon pour qu'en quelques heures d’une parfaite insouciance se remodèle les structures archaïques. Un peu plus loin près de l'eau Sophie aidait de jeunes enfants à creuser des rigoles profondes et longues pour favoriser la progression de l’écume jusqu’à un bassin de rétention rehaussé de tours crénelées. Son corps déjà adulte répondait à celui des enfants dans une sorte d'homothétie amplifiée par ses grands gestes et rendait compte de son enthousiasme et de la joie simple de faire participer les éléments à son univers. L'eau, le sable, les frottements, la fraicheur. Et cette liberté cette aisance projetait sur nos corps d'adultes également nus, mais entravés et statiques, le constat de notre incapacité à communier également avec les éléments qui s'offraient là pour tous et dans une lumière radieuse. C'était fini. Pour retrouver notre innocence, une simple vitalité il fallait désormais s'inscrire à des stages, faire du yoga, se concentrer pour mémoriser l'instant, payer un coach pour retrouver le cri primal, partir en Inde, la défonce et l'alcool, toutes ces conneries de morts-vivants que

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Porcelet


« Je viens si tu fais le ménage dans ton taudis, tu sais, je ne suis pas seulement un cochon de Stromboli mais aussi une princesse italienne », me dit l’Italien. 



«  E tu ? Sei all'altezza dei maialini di Stromboli ?», me demande l'Italien qui se remet à me parler correctement (je lui demande de m'apprendre).

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Le Droit d’être de droite



Le droit d’être dans l’enthousiasme. Le droit d’être du côté des gagnants, pas des dépressifs. Le droit réel. Le droit de manger, de dévorer. « L’art est de droite », me dit Thomas Lévy-Lasne. Et, bien sûr, c’est le secret, c’est le secret du grandiose. L’art est bel et bon parce qu’il est le meilleur. L’art réussit avec éclat. Qu’est-ce qui est le plus efficace ? — si écrire l’est, écrivez, si écrire ne l’est pas, n’écrivez pas. Le droit d’appartenir à Paris. Paris centre, cet agglomérat d’infinis et les repères : les monuments. Paris de l’embellissement et de la solidarité du Bien. J’ai vu un black merveilleux aujourd’hui, très noir et habillé de noir, un costume noir, une chemise noire et une cravate rose ! C’est une des choses les plus belles que j’ai vue de ma vie. Je voulais le photographier, mais (comme d’habitude) je n’ai pas osé... Mais je ne partais pas. Il faisait les 100 pas au téléphone, le long de l’école, en parlant avec véhémence. Mais le costume était parfait, parfait pour un spectacle. Un black très black, habillé de noir, très fin, avec une cravate rose, rose, un rose parfait, pas pink, beaucoup plus frais : un vrai rose. 

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L’Elégie / l’éloge



« Oui, l’élégie fut une forme de départ pour moi. J’ai commencé à écrire dans la hantise de la mort. Et puis, petit à petit, je me suis dis que l’élégie à haute dose n’apportait rien de positif, en tout cas à moi. C’était simplement le constat qui s’accumulait en vain que la perte gagnait toujours. Je me suis rendu compte que l’élégie comme forme de vie ne pouvait absolument pas procurer même le début du commencement du bonheur. Alors j’ai pris la décision de « minorer » l’élégie, de la transformer en partie en éloge au sens poétique, c’est-à-dire en acquiescement à l’existence. Bien sûr, le fond de perte n’a pas disparu, mais contre lui j’essaie d’accumuler des preuves de l’existence. »

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spectacle Xavier Croci
soir et matin
mais dans l’après-midi rien
ou by night

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Ma loge à Paris


Rencontré Marie Collin ce matin, dans ses sublimes locaux face au Louvre. Elle est adorable, grandiose comme une princesse et elle a les rêves vastes comme Paris. C’est une énergie. Quand je reviens dans mon « bureau » à moi, c’est de nouveau la sensation d’habiter une loge, d’avoir une loge à Paris, et que Paris est le théâtre. D’ailleurs le projet d’Avignon qui bat de l’aile, elle me dit : « Pourquoi vous ne le feriez pas à Paris ? » Ce n’est pas du tout le même ambiance, Paris... mais c’est vrai que, pour elle, Paris est un festival...

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Une idée de Laurent Bazin



Laurent Bazin (belle voix intelligente, hétéro, catholique, ouverte, cultivée et sexy) qui vient de remporter le prix du théâtre du Rond-Point* pour sa mise en scène de Bad Little Bubble B. (qui sera reprise la saison prochaine, du coup : c’est ça, le prix) a une idée merveilleuse de performance (ou de spectacle à une personne). Le titre est très bon : La comédienne accepte — et l’idée, c’est ça : une comédienne qui accepte ou non. Il pense à Christine Armanger pour ça, ce qui est aussi une très bonne idée... Acceptera-t-elle ?



* Festival Impatience, prix du jury. 

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Le Secret insensé de vivre



« Ecco il poeta », me dit l’Italien.

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Page 35



De longs moments



« Pour vous personnellement, quelle est la chose de Pina qu'il convient de sauver absolument ?

— L'honnêteté, le courage, l'exigence. Et cette petite histoire qui lui appartient. Un jour, Pina était interviewée à la télé, et ça se passait mal. Elle restait de longs moments sans répondre. En désespoir de cause, le journaliste lui a demandé : « Que diriez-vous à un jeune garçon qui commence à danser ? » « Rien, a-t-elle répondu. C'est une chose que chacun doit trouver en soi. » »

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L’Art comptant pour rien



Apparition

C’est une initiative poétique, très légère ; si elle ne l’est pas, elle ne peut pas fonctionner. Il faut que ce soit léger comme l’air, spirituel. C’est juste montrer que dans l’envahissement de la ville du mois de juillet où tout se loue à prix élevé, il y a encore comme une vie fantomale autre derrière une écorce, à peine une écorce, une pellicule de protection quasi invisible ; enfin, que qqch est possible avec rien (mais avec splendeur). L'essentiel. Il s’agirait que quelqu’un accepte que je soulève un pan du voile pour m’y glisser juste avec 10 personnes — mais sans déranger, sinon la magie disparaît — peut-être 2 fois par jour s’il y a de la demande —, sans que rien ne soit bougé du décor et de l’atmosphère, c’est-à-dire : comme si cela n’avait pas lieu. C'est donc l'histoire (atmosphérique) d'un lieu intouché, non exploité, privé. C’est une utopie, mais le théâtre, pour moi qui en rêve toutes les nuits, est de cet ordre : intemporel et évanescent.  Je pense à une lecture d’Alfred de Musset, La Confession d’un enfant du siècle, le célèbre deuxième chapitre qui dure 3/4 d’heure. Il faudrait, pour cela, un grand luxe, mais un luxe ancien, pas moderne, salon ou chambre d’un appartement noble, hôtel particulier. Idéalement, il faudrait que je puisse loger sur place (la première idée avait été une chambre d’hôtel à la Mirande). Il faudrait que ce soit intra muros, au cœur, et « irréel », une atmosphère, le lieu agissant comme décor et le décor agissant seul (« Rien n'aura eu lieu que le lieu »). Dans le « Journal du Off », célèbre publication à paraître, il est déjà indiqué la durée du festival (du 8 au 31), mais ça pourrait être sur 10 jours ou une semaine car cela pourrait avoir lieu dans des lieux différents (2 ou 3, voire jusqu’à 5). La publicité — dans l’idéal — devrait être à la fois grande et invisible car le nombre de spectateurs sera volontairement réduit. Happy few. Idéalement, tout le monde devrait entendre parler de cette performance et personne ou presque de la voir (comme souvent d'ailleurs les meilleurs spectacles à Avignon qui ne se jouent que 3 jours ou en jauge très réduite). Une légende, une rêverie, une apparition-disparition (mon association ne s’appelle-t-elle pas Le Dispariteur ?) C’est la figure du poète errant, du vagabond. Le vagabondage comme expérience de la liberté. Etre présent (partout), mais absent (poétiquement). « La liberté, c’est épouvantable, j’entends tout d’un coup à la radio, parce qu’il faut l’inventer jour par jour. » Un accueil, à l’endroit où normalement il n’y a pas d’accueil — et garder ce caractère intouchable, comme je l’ai dit — néanmoins un accueil, une confiance, on ne sait pas pourquoi, confiance, mécénat, protection « religieuse » du poète et de ses disciples (en cette époque). J’ai un budget relatif pour le coût de cette expérience (mais budget). Le public ne paye pas — car on le considère et on lui demande de se considérer comme un ami —, l'artiste n'est pas payé — un ami lui aussi, qui d’autre ? — et il est même question d'offrir rafraîchissements et champagne, comme à mon habitude. Recevoir, comme on dit. Rien. Du tout —

Yves-Noël Genod

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Rerun : deuxième texte lu pas Edmonde à la radio


Quitter le théâtre

« Retarder un peu le moment où l’on va devoir entrer dans la vie et quitter le théâtre. Continuer à jouer, marcher sur le fil, dire des mots d’amour. Surtout ne pas s’absenter de l’ardeur juvénile. » Oui, il y a dans le grand rapport avec le soleil, avec la nuit, avec l’été, avec le ciel qui monte comme une mer, avec l’espace, la place discrète prise par les insectes, avec la nuit, avec la mort, qqch comme de la déshumidification de la mémoire... J’ai oublié qu’une phrase pouvait vouloir dire autre chose qu’une phrase. J’ai oublié ce que je voulais dire, si j’ai dit qqch. J’ai oublié. Seul apaisement : la lecture, récit de la mémoire, navette spatiale. Les biographies. Là, on invente tout. La poésie... Oui, le soleil monte, la mer de soleil... — Albert Camus a dû écrire des pages semblables sur l’Algérie... — oui, le soleil, le petit avion de la libellule, l'hélicoptère du frelon... Plantes mauves, jaunes, sèches qui courbent doucement la tête, le motif« Chaque jour est un retour de suicide, mais les nuits nourricières offrent l’éclat et le ravissement du matin, la plume et la machine ont un appétit sans bornes, traversent le papier d’une encre voluptueuse, noir et blanc de la souffrance, calligraphiée de plaisir. »


« La mer lui fournit un vaste réseau d’images. »

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