Sunday, March 02, 2014

A quelqu’un qui ne connaît pas le film


« A quelqu’un qui ne connaît pas le film, je le résumerais donc ainsi : c’est, une fois de plus, une tentative de description de l’imaginaire, et cet imaginaire est étudié comme dans un documentaire. C’est un film qui se refuse à séparer la vie réelle et la vie imaginaire. Je persiste à dire en riant que vie imaginaire et vie réelle sont aussi inséparables pour moi que le pommier de l’hiver et ce même pommier l’été. Il n’y a pas la pomme qui serait l’imaginaire et le pommier d’hiver qui serait le vrai pommier. Pour moi, c’est un tout. Ce n’est pas particulièrement neuf, cela se dit depuis 6000 ans. »



« Quand je le peux, j’aime bien commencer un film en ayant la riche sensation de mettre en présence des éléments qui vont interagir l’un avec l’autre. En demandant à Podalydès de prendre en charge la troupe de jeunes acteurs de la Compagnie de la Colombe, j’ai été débarrassé d’un cas de conscience : je ne voulais pas « inventer » leur travail, je voulais que ça « arrive » [il fait un geste auguste de la main vers son visage, ndlr]. »

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J oie, silence, perméabilité, faiblesse


Il y a 2 troupes, l’une payée (très peu, mais enfin), l’officielle, participants : Jeanne (soprano), Bertrand (contre-ténor), Simon (acteur, pas payé, lui, mais défrayé), Louis (trompette), Ana (danse), Mario (Violon).
Et une deuxième, non payée, de guests ou, mieux, de « squatteurs », plus nombreuse, ce sont des gens qui ont accepté — et désiré — être là même sans money (sauf tombé du ciel). Participants : Soleïma, Fernanda, Sigrid, Damien, João, Bernard, Boris, Pietro, Perle, Ambroise, Gus, Philippe, Joana, Christian (Mualu), Alexandre.
La difficulté est énorme, soit c’est génial, soit c’est nul. Ce qu’il faut, c’est s’en foutre de la difficulté, on ne s’en occupe pas, parce qu’on n’a pas le temps de s’en occuper. On a, en effet, 6, 7 jours pour faire le spectacle (le 19 étant probablement consacré au montage et nous jouons déjà les 27, 28, 30 en avant-premières et en filages film, photos). Il faut donc que tout soit prêt d’avance, que vous n’ayez rien à « faire » (seulement jouer). C’est-à-dire, qu’est-ce qui doit être prêt d’avance ? Les costumes (je vous ai déjà dit qu’idéalement le spectacle, ce son et lumière, se devrait de n’être que costumes, que des fringues avec personne dedans. Ce que dit Georges Didi-Huberman va dans ce sens : « Le mystère n’est pas derrière la porte, il est la porte elle-même (si la porte est aussi belle et intéressante qu’un tableau de Vermeer). » Fait d’avance, le dessin, le tableau, « Les femmes comprennent cela : / On n’est pas duchesse à cent mètres de son carrosse » (Wallace Stevens). Et, deuxièmement, donner l’impression (pur bluff) d’une troupe parfaite, une troupe africaine, venue d’un pays — le Congo, par exemple ! — où les gens ne se méprisent pas. C’est impossible en Occident où nous sommes programmés à l’isolement — donc désirer le miracle, l’absolu miracle que vous croyez en Dieu ou pas car il n’y a que cette solution. Aide-toi, le ciel t'aidera.
Si on a ces 2 choses, apparence et amour (passer de l'absurde à l'amour), tout, absolument, est possible, tout peut surgir car il s’agit, avec cette troupe, de faire entrer le monde extérieur à l’intérieur du théâtre. Un certain envahissement. Du monde extérieur. Le risque pris avec le monde extérieur.
Dans mon esprit, il y aurait donc 3 parties, la première qui est celle que nous avons déjà faite en septembre — qui s’achève justement sur l’arrivée de cette foule extérieure, cette démultiplication des pains (des saints) qui ouvre sur la deuxième partie dont je ne sais rien. Puis une troisième partie de nouveau plus chantée (ou dansée)… Mais les choses seront peut-être moins nettement séparées… Une difficulté que je rajoute, ce serait — je viens de le lire ds une critique parue sur le film (que je n’ai pas encore vu) The Grand Budapest Hotel —, ce serait de jouer très vite, que cette foule soit, en plus, une foule d’une énergie très violente, très virtuose de manière à jouer beaucoup en peu de temps (que ça ne dure pas 4 h). C’est-à-dire pouvoir — en plus ! — jouer plusieurs personnages, changer d’apparence plusieurs fois, dans un tourbillon métaphore de la rue. Bref, au boulot ! Vous avez intérêt à vous préparer des cartouches ! Je ne vous envie pas. Vous serez heureux si le miracle se produit, mais sinon… Il faut, en qq secondes, exister dans le cœur des gens comme s’ils vous avaient toujours connu, reconnu… Tricky ! J’ai une fois dans ma vie joué un grand rôle (avec Julie Brochen) et c’est là que j’ai réalisé que c’était de loin le plus facile : le public dort (dans une pièce classique), mais, en dormant, pense à vous, rêve à vous, ça se fait tout seul. Là (et encore une fois dans l’hypothèse où on y arriverait), c’est fort de café ! Il s’agit de vivre comme des plantes, comme des parasites, des poux, dans la chair et la peau de ces bienheureux spectateurs, des bêtes familières… Ça a beaucoup à voir avec le fantôme… Une seule solution : tricher, faire (absolument) croire à une troupe, non pas seulement à une foule, mais une troupe (sinon le spectateur ne supportera pas de voir encore qq’un, encore qq’un, etc.) Leonard Cohen dit : « If you don’t become the ocean, you’ll be seasick every day. »  Quel grand homme ! Je vous rappelle les inspirations que je vous proposais (volontairement limitées à 3 parce que sinon) : Le Diable probablement, Robert Bresson, Le Maître des anges rebelles, Bruno Perramant (expo à la galerie In Situ, 17-19, rue Michel Le Comte, près de Beaubourg) et L’Heure où nous ne savions rien l’un de l’autre, Peter Handke. (Aussi Zurbarán, à Bruxelles, et toute la peinture classique, évidemment, au moins jusqu'à Monet.) Toutes les musiques et toutes les poésies. Je vous conseille d’apprendre un beau poème ou 2 (dans les langues maternelles) pour avoir qqch à sortir des lèvres — pour le cas où ces hologrammes, ces fantômes soient vivants ! Le 6, 7, 8, nous avons la salle jusqu'à 16h30, mais avec un décor dedans malheureusement. On fera avec. Voici le planning pour le 6. Le 7 et 8, je vais vraiment voir tout le monde, je reprécise au moins le soir du 6 dans quel ordre ce sera ou si c’est tous ensemble tout le temps (sauf ceux qui ne sont pas là, ces journées n’ayant pas été demandées obligatoires). Peut-être qu’il faudrait trouver le moyen de se voir entre le 9 et le 19 dans une salle quelconque... Mais la question des costumes, de l'apparence n’avance pas… c'est une épine, ça...

Planning du 6 :
9h, Mario
10h00, Mario + Jeanne + Bertrand
11h30 Damien + Pietro (si là) + Boris + Christian (Mualu)
13h Ana
14h30 Ana + Mario + Damien + Pietro + Boris + Christian (Mualu)
15h30 Sigrid + Soleïma + Fernanda + Joana + Perle + Damien + Pietro + Boris + João  + Christian (Mualu)
17h fin.

Un seul assistant nécessaire le 6 (surtout pour ouvrir aux gens), choisissez, Simon ou Gildas… Youness, tu passes quand tu veux (sauf dans les seul à seul Mario, Ana)…

Tenez, 3 citations de Peter Handke que je trouve parce que j’ouvre enfin, ce matin, ce livre posé à mon chevet depuis quelque temps (Hier en chemin, un journal de voyage) :

« et me voilà depuis près de 2h maintenant ds le Jardinillo d’Alcázar, tout au fond, près du dernier arbre, et je me sens devenir toujours plus pur (comme il y a 14 mois au square des Batignolles), rien qu’en restant là, à regarder, réfléchir, revenir ou anticiper — joie, silence, perméabilité, faiblesse — selon mon idéal. »

« en cette heure de début de soirée, à l’étranger, j’ai pu être une fois encore tout entier dans l’événement, tout entier dans (le secret de) l’image. »

« Dessine encore et encore sur le canevas de la paix éternelle »

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O parole énorme éternelle on ne t'entend pas


      
« jusqu'à ce que je devienne Dieu lui-même » (note aux acteurs)

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D imanche 2


Ce soir à Paris, à l’atelier Rouart, 40, rue Paul Valéry ds le XVIème, à 18h, une rencontre, je ne sais pas ce que je vais y faire, probablement une lecture (on ne lit jamais assez, je veux dire, en public, je veux dire, pour travailler, quoi) Entrée libre, of course. Ds le cadre de l'expo Partido Alto.

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E t elle était entièrement sincère...


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« D essine encore et encore sur le canevas de la paix éternelle »


Bon, après l’Underground Café, je suis allé voir Madama Butterfly. Comme disaient les agents de la sécurité : « C’est quoi qui se donne ce soir ? — Qqch comme « Buterfli ». » Là, j’intervenais : « Butterfly — Voilà ! c’est ça : Butterfly. » Je suis comme ça, moi. Car le mauvais son, le caca, le pourri n’est pas seulement ce que je veux me mettre dans l’oreille (pour préparer les Bouffes, je veux dire). J’étais au dernier rang, contre le mur. Je ne voyais rien, des figurines comme des fourmis. Je ne lisais pas les surtitres : ça, une aubaine, je déteste les surtitres (ou les sous-titres au cinéma), c’est nul. Mais qu’est-ce que j’entendais bien ! C’est dingue, cette acoustique ! Même, parfois, je trouvais que c’était trop fort, qu’ils gueulaient trop. J’étais au dernier rang ! Très, très, très beau ! Je sais qu’il y a un système de sonorisation, de soutien très bien fait à l’Opéra Bastille car on ne s’en aperçoit pas, alors je ne saurais dire s’ils l’utilisaient (ou pas). Peut-être, quand c’était trop fort, je pouvais avoir l’impression. Mais pas sûr. La mise en scène était parfaite car très dépouillée : zen. Et, l’histoire, je ne la comprenais pas, mais quand je l’ai lue sur Wikipédia, à l’entracte, je l’ai reconnue — et j’ai été presque déçu d’en savoir qqch pour la deuxième partie : c’est tellement mieux, la musique seule, on comprend tout, on n’est pas con ! Y a une chose sur le prix des places, je voudrais suggérer. Ça ne reflète pas du tout la société. La place du dernier rang — comme j’ai pas réussi à trouver une place à 15 € (il faut venir très en avance), je l’ai achetée à un couple qui la revendait : 35 €. Hors la place la plus chère n’est qu’à 180 €. C’est rien du tout, pour les riches, 180 €. C’est que le prix d’un éternuement, d’un clignement de paupière ; ça devrait être bien plus cher ! En 1900, la différence des revenus allait de 1 à 30 (ce qui était déjà énorme), maintenant, la différence va de 1 à 300. Pourquoi, alors, ne pas réajuster le prix des places à l’opéra ? Des places à 10 € et des places à 3 000. Ou des places à 1 € et des places à 300. Ce serait logique. Ça reflèterait la réalité. Eh bien, non. Et il y a une explication à cela.  Ils ne veulent pas la montrer, la réalité, il faut la cacher. Ils ont peur de la révolte (du nombre). Il faut faire croire que tout le monde est « ensemble », en France, vous savez : « Liberté, Egalité, Fraternité » — ou en Amérique (vous savez, le mythe américain) — ou partout. Le monde ne se révolte que peu. Car il est « ensemble » (la religion) et que cette fiction est aussi peut-être une réalité. Mais comme il est grand, l’écart de cette réalité ! Voilà à quoi je laissais aller mon esprit, la tête contre la pierre en écoutant religieusement Madama Butterfly. Et puis, soudain, je déchiffrais un surtitre : « …vers le firmament, vers la mer ». Parfait ! (je peux me rendormir). C’est bon signe, me disais-je. Et puis, plus tard, je croyais lire aussi : « avoir un coquelicot… » Oui, Les Rouges, le livre de Pascale Fautrier, on en revient toujours là : Que faire de cette guerre des classes que les riches gagnent ?

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