Tuesday, April 08, 2014

P 'tite photo-souvenir

P oi, sì cantando, quelli ardenti soli


Photo César Vayssié. Ana Pi dans 1er Avril 

Labels:

M atinée d'ivresse (vous savez de qui...)


Ô mon Bien ! Ô mon Beau ! Fanfare atroce où je ne trébuche point ! chevalet féerique ! Hourra pour l'œuvre inouïe et pour le corps merveilleux, pour la première fois ! Cela commença sous les rires des enfants, cela finira par eux. Ce poison va rester dans toutes nos veines même quand, la fanfare tournant, nous serons rendu à l'ancienne inharmonie. Ô maintenant, nous si digne de ces tortures ! rassemblons fervemment cette promesse surhumaine faite à notre corps et à notre âme créés : cette promesse, cette démence ! L'élégance, la science, la violence ! On nous a promis d'enterrer dans l'ombre l'arbre du bien et du mal, de déporter les honnêtetés tyranniques, afin que nous amenions notre très pur amour. Cela commença par quelques dégoûts et cela finit, — ne pouvant nous saisir sur-le-champ de cette éternité, — cela finit par une débandade de parfums.
Rires des enfants, discrétion des esclaves, austérité des vierges, horreur des figures et des objets d'ici, sacrés soyez-vous par le souvenir de cette veille. Cela commençait par toute la rustrerie, voici que cela finit par des anges de flamme et de glace.
Petite veille d'ivresse, sainte ! quand ce ne serait que pour le masque dont tu nous as gratifié. Nous t'affirmons, méthode ! Nous n'oublions pas que tu as glorifié hier chacun de nos âges. Nous avons foi au poison. Nous savons donner notre vie tout entière tous les jours.
Voici le temps des Assassins.

Labels:

E t la grotte, fatale aux hôtes imprudents


Pas de notes particulières pour ce soir (ou que je n'ai pas déjà dites), bonne représentation, mais salle assez baillante, tout du long, je ne sais pas pourquoi... Scène des garçons un peu moins bonne, il me semble, mystérieuse ou « ensemble » que samedi (où elle était très bonne). Première partie de la scène mondaine doit être plus rythmée, plus courte. C'est-à-dire que les gémissements de Soleïma enchaînent presque avec le Minotaure. Tant pis pour ce que vous ne pouvez pas « mettre » dans cette scène (vous pouvez aussi faire plus court, plus rapide, par ex, Francesca et Paolo au fond). Ce qui compte (que vous devez faire plus encore), c'est l'espace — immensifier le temps et l'espace — pour que les existences, les vôtres, soient émouvantes et belles car totalement perdues dans le cosmos (infini). Et puis les morts, bien faire penser que vous en êtes. Vous entrez dans une salle souterraine — qui ne voit pas le soleil depuis des milliers d'années — où la vie s'est retirée, vous entrez dans la vie des morts jusque dans leur odeur et peu à peu on comprend que c'est vous, ces morts anciens des époques antiques, c'est vous-mêmes qui êtes les fantômes et qui ne voyez jamais le soleil, pas ces faux touristes que vous nous avez fait croire au début... (et ça doit glacer les sangs malgré le « réalisme » de la légèreté).
Ce soir venez à 19h30 pour qu'on ait un moment ensemble avant la mise à 20h10.
Merci, 

YN

Reconnais-tu le Temple au péristyle immense,
Et les citrons amers où s’imprimaient tes dents,
Et la grotte, fatale aux hôtes imprudents,
Où du dragon vaincu dort l’antique semence ?...

Ils reviendront, ces Dieux que tu pleures toujours !
Le temps va ramener l’ordre des anciens jours ;
La terre a tressailli d’un souffle prophétique...

Cependant la sibylle au visage latin
Est endormie encor sous l’arc de Constantin
— Et rien n’a dérangé le sévère portique.

(Nerval)

Labels: ,

Photo Philippe Gladieux. Bertrand Dazin et Jeanne Monteilhet dans 1er Avril 

Labels:

A ddiction


Denise Luccioni
Il y a de la magie dans l'alliance du lieu, de l'œuvre et d'une vision théâtrale baroque et épurée (ce n'est pas contradictoire). Quand je dis « magie », c'est celle éprouvée lorsque je me sentais « exposée » à une mise en scène de Régy et non simple spectatrice, ou « transportée » par le Tristan et Isolde de Peter Sellars/Bill Viola à l'opéra Bastille.



Moni Grego
Un slogan pour vous amuser, Y-N Genod, la seule personne qui parle à des murs et obtient des réponses ! Votre travail est en moi tout le temps, c'est joliment tuant. Je pars bosser ds le Sud. Je vous envie de retourner dans l'antre de la bête encore.
Je serais bien revenue lui laisser manger à nouveau un petit bout de mon âme… Enjoy !



Véronique Thé Au Jasmin
Que le miracle se renouvelle !
PoiSon d'avril est addictif. J'y reviendrai samedi pour prolonger cette Rencontre, ce Voyage heureux... A perpétuité !



Julia Leblanc Lacoste
Merci Yves-Noël.  Je me couche bousculée par tout ce que je viens de vivre avec vous tous aux bouffes du Nord.  A bientôt !



Adeline Moreau
Bonsoir. Je sors de votre pièce. Merci pour cette expérience sensorielle magnifique, drôle et existentielle. Je sens que les images de ce spectacle vont me poursuivre encore très longtemps.  Merci-merci-merci. Je serais très heureuse de vous rencontrer un jour et de participer à ce grand bal ou à un autre. C'est tout ce que j'aime.
Bonne nuit !!!!!
Adeline



Miléna Kartowski
Yves-Noël Genod, le faiseur de rêves sans soleil a mis au monde un chef-d’œuvre au théâtre des Bouffes du N...
Noir, profond, total, sans recours, sans secours. Nous sommes dans les entrailles des Bouffes, au Nord de Paris, tout au Nord… L’eau, les tréfonds et la pupille qui tente de se dilater pour attraper les quelques raies de lumière qui pourraient se dérober. Les abysses de l’inconscient s’ouvrent, les viscères se relâchent et le pays des rêves avance à pas feutrés. Une fumée se dessine, celle de la nébuleuse de l’esprit. Elle perce dans le noir absolu. Nuage vaporeux qui s’élève et découvre l’obscurité totale. Où allons-nous ? Entre Eden et Hadès, perdition et désir, nous faisons confiance au chamane de la poésie, sans comprendre où nous posons nos sens. Didon et Enée ou le récitatif chimérique de la solitude. Le contreténor épouse les murs sacrés du temple brookien dans son habit de survie informe tandis que la soprane vocalise délicieusement tout en habitant son giron. Ses jambes infinies s’enroulent dans la robe strassée surmontée d’une veste rouge carmin au format torreresque.
Les premiers sursauts de grâce apparaissent… Ils ne nous lâcheront plus.
Des personnages felliniens, perdus, majestueux et brisés traversent les échos de ruissellement, les arias manqués, les suraigus pris dans une lointaine distorsion. Nous sommes chez Lynch, Wenders, Rembrandt et Haendel… Genod peint un magistral tableau des rêves sous nos yeux, génie des clairs-obscurs, des ombres portées, des noirs profonds et des allumettes-veilleuses. Une bougie solitaire sous la coupole observe les perditions terrestres.
Les femmes, les hommes, les silhouettes sibyllines, les elfes et les corolles diaphanes irradient le plateau, fleuve du désir. Les objets trouvés s’accordent aux apparats de bal. La trompette côtoie le shofar-branche d’un sage à la barbe blanchie, le violon enivre une nymphe couleur ébène, les vers de la Divine Comédie se distillent sous les traits d’un joueur de football américain en pleine cavalcade.
Si c’est une fantasmagorie, qu’elle se prolonge à l’infini. Si c’est une pièce de théâtre, qu’elle habite les bouffes, loin au nord, jusqu’à l’aube.
1er Avril est un gros poisson illusionniste, un funambule virtuose paré d’une crinoline, un opéra fragile tout en ombres et en échos.
Prenons un dernier verre.
Faisons l’amour, jouissons.
Endormons-nous et rêvons, rêvons d’un chaos opératique, gracieux… Celui dont nous sommes tombés amoureux.



Olivier Charasson
Ce que Baudelaire préfère au théâtre, c'est le lustre. Yves-Noël Genod se contente d'une chandelle. Il a donc bien raison de nous avertir que 1er Avril n'est pas un spectacle. C'est une flamme, rien qu'une flamme.



Gilbert Traina
Tant de vies... Tant d'histoires... J'aimerais tant revoir ces échoués qui me manquent...



Patric Reves
Un spectacle d'une grande beauté et d'une poésie rare ! Allez-y et laissez-vous embarquer...



Yves Godin
Je ne sais que dire, c'est magnifique. Je suis très ému. Bravissimo

Merci, très cher ! Yvno (Envoie qq personnes si tu peux, comme tu vois — mais c'est beau aussi — c'est vide...)

C'est d'une réjouissante beauté ! Bien sûr, j'en parlerai. Merci encore !

Labels: ,

Photo Philippe Gladieux, 1er Avril 

Labels:

Chers amis, 

Demain, samedi 5, il faut qu'on se parle et que je puisse vous donner des notes précises, souvent que j'ai depuis plusieurs jours, mais que je n'ai jamais l'espace de placer. Il faut de la concentration, ne serait-ce que 3/4 d'heure pour les entendre. Y a-t-il une alliance possible entre la lucidité et la joie ?, c'est le thème de ce spectacle, et particulièrement pour cette scène plus fragile que les autres et qui donc peut paraître plus faible. Cette scène pour laquelle il faut être à la fois lucide (ne pas se voiler la face) et joyeux (dans la plénitude). J'essayerai d'appeler les gens un par un (ceux qui ont des notes) dans la journée, mais, le soir, il faut vraiment — et à défaut de pouvoir répéter — qu'on se consigne. Ce serait dommage de laisser une brèche pour la critique. Je suis orgueilleux : j'ai voulu qu'il y ait une scène de groupe bien que je la sache impossible. Mais, voilà, la solution est dite dans le texte que je raconte, il faut laisser les choses dans leur impossible — « pas d'arrangement avec l'impossible », dit Cioran — et faire face à cet état des choses : y a-t-il une alliance possible entre la lucidité et la joie ? (« Le gai désespoir », disait Duras.)
La difficulté, c'est de ne pas faire de raccord, évidemment. Sans doute mardi faudra-t-il en faire si on ne trouve pas de solution « théorique » applicable demain...
De manière générale, il faut jouer beaucoup plus l'aristocratie, les fantômes de l'aristocratie, l'Italie, le passé toujours plus fabuleux, les personnages bourrés de fric (c'est-à-dire : exactement le contraire de ce que vous êtes). L'argent, la folie de l'argent, les héritiers, les gens qui ne font rien et qui, ne faisant rien, voient leur fortune se démultiplier. Et puis la mort, Visconti, et puis une extrême concentration d'être à la fois vivants et morts, comme dans La Chevauchée sur le lac de Constance, comme dans Le Temps et la Chambre, comme dans un spectacle du théâtre du Radeau, Choral, par ex, comme dans Dostoïevski par ex. Je vais dormir et la nuit me portera conseil (j'en suis sûr). Je trouverai des choses pour vous aider (à briller comme des fantômes phosphorescents de chair et de sang que vous êtes). Mais je ne peux pas tout. Aide-toi, le ciel t'aidera. Aime ton prochain comme toi-même, c'est-à-dire comme toi-même tu dois t'aimer. Vous pouvez vous amuser à jouer dans cette scène. Quand vous le faites, c'est beau. Il y faut de la détente. Et plus vous jouerez bien, plus vous disparaîtrez. Un comédien (tout le monde le dit), aime sans doute plus disparaître (derrière le rôle) qu'apparaître. C'est plutôt pour disparaître qu'on joue. Vos rôles, vos fantômes ne sont pas loin, ils sont là. Aimez-les. Servez-les. Avec confiance.
Ah, encore une chose : il y a quelques Français dans cette scène (Louis, par ex, clairement français), mais ce n'est pas la majorité, c'est jet set, c'est cosmopolite, c'est italien...
Venez à 18h30, ce groupe, pour qu'on se parle de 18h45 à 19h30. Ça vaut le coup. Il s'agit de votre splendeur.
Encore une fois, j'aurai sans doute une idée dans la nuit...
Bises, love,

YN

Labels: ,


Photo Philippe Galdieux. Loge de 1er Avril 

Labels:

T oute la culture



Merci infiniment ! Je ne sais plus quoi dire devant tant de louanges, sauf — intérieurement — pourvu qu'on y arrive encore... pour 5 représentations... Mais ça me porte, ça nous porte ! Merci !

Labels: ,

T hérèse, Pascale

Yves-Noël Genod, 1er Avril aux Bouffes du Nord : préparation à la vie nouvelle.
Ces phrases de Thérèse d'Avila tombées par hasard sous mes yeux donnent une idée, je crois, de ce que j'ai vu et entendu dans cette salle haute, grise et crayeuse, ors anciens et soies déchirées des murs, embrumée et comme recouverte de feutre : « Ce qui nous importe, ce qui importe à l'âme, qu'elle pratique ou non la prière, c'est qu'on ne la néglige ni ne l'opprime. Il faut la laisser aller libre dans ses multiples demeures, de haut en bas et sur les côtés, puisque Dieu lui a conféré tant de dignité ; elle ne doit pas rester longtemps confinée dans une seule pièce. Oh, mes filles, ni même dans la connaissance de soi ! A l'entour de cette pièce, la première demeure, celle de la connaissance de soi, il y en a beaucoup d'autres, et au-dessus aussi. Parce qu'il y a lieu, ici, dans notre château aux multiples demeures, de considérer les choses de l'âme dans leur plénitude, dans leur étendue et leur grandeur : il ne faut rien lui chicaner à l'âme, parce que sa capacité surpasse de loin ce que nous pouvons imaginer. C'est de toutes parts qu'elle reçoit le soleil qu'il y a dans ce palais. »
Pousser les murs, c’est ce qu’il fait, Yves-Noël, avec ses acteurs, ses amis, s'envoler pour suivre le chant de cette voix, laisser l'espace s'ouvrir sous les coups de boutoir de ce rire, se souvenir de la tempête qui gronde dehors, nous menace et nous crucifie, mais pas trop longtemps, danser avec ce couple qui danse, mais pas trop longtemps, s'égarer, avoir enfin le loisir de s'égarer, de se noyer dans ce verre d'eau noyé dans l'eau : la gaieté légère d’une tenue de fête, la griserie de la rumeur dans la pièce envahie maintenant par tous les acteurs bavardants, murmurants, ils sont si beaux, ils se sont faits beaux, ils paradent sur la crête de leur vie, il y en a un qui veut tout tout de suite, un rien et c’est la chute, elle est là aussi la chute, l’ange déchu nu dans sa parka sale comme l’homme fou qui hante le faubourg Saint-Denis un peu plus bas dans la ville, sauf que lui sur la scène il chante, il est sauvé, parce que ça ne fait rien, la peur de la chute, ça ne nous fait plus rien, ils tiennent le coup quand même, là, devant nous, ça ne tient qu’à un fil et nous tenons avec eux le fil fragile, le seul qui nous maintienne à vie, le seul qui fasse que ça vaut le coup l’existence, et qu’on n’a plus peur, comme une main tendue, comme un sourire qui durerait, on se serait retrouvés enfin, on serait là tout le temps, disponibles, vivants, on n’aurait plus peur, on aurait les mains pleines et tout à dépenser, on donnerait tout tout de suite, les sourires, les corps : glorieux, on serait là enfin, et ça durerait, plus qu’une nuit de fête, ça durerait toujours. Sur la scène des Bouffes du Nord, ça ne dure que deux heures, mais c’est comme une préparation à la vie qu’on voudrait, à la vie nouvelle dont on rêve. C’est dans la tête d’Yves-Noël Genod et c’est à nous aussi de continuer à vouloir, dehors, sur le trottoir où on se retrouve après, le trottoir où c’est fini de rêver et où on risque de tout perdre. A moins que le risque, le vrai, ce soit de le suivre, Yves-Noël Genod, d’y revenir encore, aux Bouffes du Nord, revenir voir encore son spectacle : c’est jusqu’au 12 avril, il reste quelques jours… pour se plonger dans la vie nouvelle.
   



Mon Dieu, quand je lis des choses comme ça, je me dis : pourvu (— comment ? —) qu'on y arrive encore pour 5 représentations ! Les choses les plus belles qu'on ait écrites sur mon travail (comme aussi cet article de Jean-Pierre Thibaudat pour Chic by Accident qui était sorti la veille de la première ! — il était venu à une avant-première) me font froid dans le dos : peur de ne pas être à la hauteur. Humanité si fragile, si fragile à rassembler… « Une préparation à la vie », mais ça tire les larmes de lire des choses comme ça, Pascale ! fais gaffe ! « On aurait les mains pleines et tout à dépenser »... Et cette phrase de Thérèse : « qu'elle pratique ou non la prière », c'est bouleversant… Voilà ce que nous allons faire : pratiquer — ou non — la prière… Merci infiniment de t’être balader dans ce palais de soleil — ou pas — de soleil, Pascale ! Nous faisons un raccord tout à l’heure et je peux te dire que cette phrase de Thérèse, elle va nous servir ! Merci aussi pour ça !

Labels: ,

S 'aimer, c'est regarder ensemble dans la même direction


Photo Marc Domage. Dominique Uber et Louis Laurain, lumière Philippe Gladieux, dans 1er Avril 

Labels: