Saturday, October 18, 2014

Début d'un texte : « Il existe en été... »



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D e ma chambre au soleil


Il faut que je dise qqch du spectacle auquel David Bobée m’a convié hier, Lucrèce Borgia ; je vais essayer d’être concis parce que le spectacle est juste splendide et ce n’est pas sûr qu'on puisse en dire davantage. J’ai la sensation vague que je ne devrais pas aimer ce spectacle, hors, c’est tout le contraire. La même impression, mais décuplée, qu’après son Roméo et Juliette. Dans les 2 cas, je découvre la pièce monument sur le moment. Ça paraît fou, mais je ne connais rien au théâtre. Je suis toujours, devant le théâtre, frais comme un gardon, je ne sais pas comment je m’arrange, ça paraît invraisemblable, mais c’est comme ça. Je me suis même demandé hier si, quand même, je n’avais pas déjà vu une fois la pièce, Lucrèce Borgia, comme, quand même, peut-être, il avait dû m’arriver de voir Roméo et Juliette : ces pièces sont si connues, si aimées. Mais, alors, je ne les aurais vues que dans des mises en scène ennuyeuses qui me les aurait fait instantanément oublier ? peut-être... l’être humain a de ces défenses, souvent. Toujours est-il que je découvre la pièce de Victor Hugo dans une mise en scène virtuose de David Bobée comme s’il en avait passé la commande à ce librettiste, Victor Hugo (le Shakespeare français). Mise en scène inaugurale, pour moi, comme si j’étais ado. Pourquoi je marche ? J’étais avec Anna. Anna qui enseigne le théâtre à des ados (justement à Créteil), me dit : « Tu es comme les gamins de 12 ans qui sont capables d’inventer tous les arguments possibles pour dire à quel point un spectacle est génial, alors que c’est juste qu’ils ont trouvé beaux les interprètes. » Oui, c’est vrai, David Bobée me transforme en ado et je me laisse emporter sans pudeur dans cette métamorphose, au milieu de la foule dont je participe. Mais cela n’explique pas. Il y en a tant des spectacles qui demandent aux spectateurs d’être des ados, ce qui, en général, m’exaspère car je n’ai plus l’âge, je connais les trucs, je pars à l’entracte, comme dans le Macbeth d’Ariane Mnouchkine — comment se fait-il que, là, ce soit tout le contraire ? Que je me reconnaisse — ou ne me reconnaisse plus — exalté comme au premier jour au point d’applaudir, crier comme à Guignol, vouloir intervenir, sauver Lucrèce, sauver Gennaro ? Un mot me venait quand j’essayais hier soir déjà — dur métier que celui d’être un homme — de comprendre ce mystère, le mot de « plain-pied ». Oui, je suis de plain-pied avec ces spectacles de David Bobée qui sont la générosité même, Roméo et Juliette dont je me souviens aussi comme si c’était hier et celui-ci, plus fabuleux encore, plus féerique, comme les étoiles de Broadway ou de West End. Il y a un secret en David Bobée, une santé, un secret qui est mon maître : il fabrique des spectacles de théâtre qui sont des spectacles. Le théâtre est comme libéré du théâtre. Ainsi je ne pourrais pas répéter les qualités de ce spectacle (elles sont immenses) : je suis comme un enfant qui trouve les interprètes beaux, les lumières, les musiques, les scénos, les miroirs, les costumes, les textes sublimes. Je pense comme Béatrice Dalle qui, quand on la félicite après, dans le hall, dit : « C’est le patron qu’il faut féliciter. » La scénographie est une splendeur genre Versailles. Les interprètes inoubliables. Béatrice Dalle, on ne peut pas dire qu’elle soit bonne ou mauvaise, un peu comme Brigitte Bardot dans Le Mépris, exactement ce qu’on peut dire de Brigitte Bardot dans Le Mépris : ni bonne ni mauvaise, Brigitte Bardot. Béatrice Dalle. « Je ne lis jamais les scénarios, je ne connais pas le casting d’un film avant de le choisir : la seule chose qui compte, c’est le metteur en scène qui me demande de le rejoindre. » David Bobée est son patron. Et le mien.

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E l Descubridor


« Un famoso poeta es menos inventor que descubridor. »
« Un grand poète est moins un inventeur qu'un éclaireur. »

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