Sunday, December 07, 2014

R esteZ vivant

   
Vous allez m’aider à faire ce spectacle, n’est-ce pas, chers spectateurs ? « Chers auditeurs », sans doute, devrais-je dire pour ce spectacle si particulier où l’œil ne sera que si peu sollicité. C’est étrange, cette expérience, c’est la première fois que j’aborde un travail de répétition dans un état physique qui me projette dans une autre vie, une autre dimension, un autre être. On m’a fait un lit au théâtre, un matelas que je traîne d’un endroit à l’autre pour ne pas déranger les ouvriers musculeux qui montent les projos (car il faut toujours donner du travail aux ouvriers, même pour un spectacle dans le noir). J’écoute le discours de réception du Nobel Prize de Patrick Modiano, si émouvant, lui, l’handicapé magnifique, où il dit : « Oui, le lecteur en sait plus long sur un livre que son auteur lui-même… » J’ai hâte que vous veniez et découvriez à ma place ce spectacle paradoxal. (Si je vois qu’on est en avance, j’ouvrirai avant samedi.) Il dit aussi : « Mais pour qu’il existe un tel accord entre l’auteur et son lecteur, il est nécessaire que le romancier ne force jamais son lecteur (au sens où l’on dit d’un chanteur qu’il force sa voix) mais l’entraîne imperceptiblement et lui laisse une marge suffisante pour que le livre l’imprègne peu à peu et cela par un art qui ressemble à l’acupuncture où il suffit de piquer l’aiguille à un endroit très précis et le flux se propage dans le système nerveux… » Je vais avoir beaucoup besoin de vous au Rond-Point !

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