Wednesday, October 05, 2016

L a Région


Une région sublime où je ne vais pas souvent parce qu'elle tient sa beauté justement du fait qu'on n'a pas envie d'y venir. Une sorte de désert sublime, des cols, des vallées, des routes — surtout à l'heure du déjeuner — où il n'y a personne ; une région inchangée du dix-neuvième siècle par exemple, du temps des voyages de Stendhal, de Flaubert, de Rimbaud, etc., de Gérard de Nerval, avant le tourisme, après le romantisme, Lamartine, tout ça : j'aime écrire, j'aime convoquer les saints et les prophètes du dix-neuvième siècle (ensuite, il ne s'est rien passé) : la nature est toujours présente, plus présente, ici, que les hommes, c'est une nature qui ressemble à la mort, oui, voilà, c'est un balcon sur la mort, cette région magnifique... Il y a des motifs merveilleux, juste avant l’homme, avant Dieu, tout ça, juste les fabuleux motifs de la nature au repos, de la mort, nuages, ciel, pluie, roche, chutes, cols, cascades, arbres verts même en automne (il pleut tard), oiseaux comme silencieux d'une éclipse, faons, animaux fragiles et calmes, salamandres, un grand tombeau, mais si large, si peu peuplé, ce que l'on appelle la nature et que, moi, j'appelle la mort. Villages aux noms romains.

S tage de luxe


Dites-moi combien il y en a (déjà). Gardez bien au moins trois places (pour ceux que je supplie de venir). Ne pas dépasser douze.
On me demande le thème du stage. Je fais mes stages sur les participants, comme des robes. C’est pour ça qu’il faut qu’ils se présentent et qu’ils disent ce dont ils ont envie. Je ne peux qu’aider, mais je n’apporterai rien de tout fait. Chaque stage doit s’inventer. Puisque c’est chaque fois la même chose : une leçon de liberté,
YN

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B al populaire


« Le prisonnier a des fers aux pieds ; vous croyez peut-être que c’est avec les pieds qu’on marche ? Non, il songe que c’est avec les pieds qu’on danse ; aussi qu’il parvienne à scier ses fers, sa première idée est que maintenant il peut danser, et il appelle la scie un bastringue. »

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P ièce d’actualité


Bonjour Frédéric, Bonjour Marie-José, 
Isabelle Barbéris m’envoie ceci : « Tu devrais proposer à Sacard et Malis de faire la dernière pièce d'actualité de la Commune (printemps 2017), ils cherchent quelqu'un et on a parlé de toi ». Alors je ne sais pas grand chose de ce que sont ces pièces d’actualité, juste que Laurent Chétouane en a fait une dont il était très content (mais que je n’ai pas pu voir, j’étais à Lyon chez Gwenaël Morin). Ce que je peux vous dire, c’est que je serais certainement ravi de la proposition si vous me la faisiez, mais que, concrètement, je ne suis libre (période de répétitions comprises) qu’à partir de début avril. Je devrai donner une pièce à la Ménagerie de verre les 14, 15, 16 mars (puis j’ai un workshop du 20 au 24 mars). La pièce de la Ménagerie s’appelle La Beauté contemporaine et elle devrait mettre en scène entre trente et soixante jeunes gens de vingt ans, pas spécialement artistes. Sur le papier. Je pense qu’il faudrait trois ans pour réussir une telle pièce, un panorama d’une génération. Mais Marie-Thérèse Allier insiste pour l’avoir cette saison. Je vous explique tout ça pour le cas où cette pièce pourrait être reprise à Aubervilliers.
Bien à vous, 
Yves-Noël

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P alpable artifice


                                               « Why who's so gross,
That seeth not this palpable device?
Yet who's so blind, but says he sees it not? »

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D e ma fenêtre un dimanche



L e Marais de Vaux


L’émotion. Se niche toujours dans des failles, des sources, des détails. Elle est là, elle est enfouie la plupart du temps. Il y a une photo de la classe des garçons de l’année 1947. Sur cette photo (de toute l’école, c’est un petit village), il y a son frère ainé, René et son frère cadet, Pierre. Normalement, me dit Raymonde, une de ses sœurs, il aurait dû y être : soit il était malade ce jour-là, soit il était déjà parti en pension, tu lui demanderas. C’est effectivement le cas. 1947, mon père à onze ans et c’est l’année où on l’a envoyé en pension à l’école Saint-Nicolas à Bourg-en-Bresse. C’est dans la plaine, l’école prépare au petit-séminaire. Il me raconte comment il a été choisi par le curé, que ses parents ne pouvaient pas payer, mais que quelqu’un a payé. En tout cas, le voilà, à onze ans, loin des siens. « Alors tu ne rentrais que tous les trois mois ? », je lui demande. « Oui, l’hiver, ça allait encore, mais, au printemps, c’était dur ! quand je savais que les narcisses étaient là, vers le mois de mai… » Je m’aperçois quand je lui réponds (vite) que ma voix se brise, que je dois cacher mon émotion. C’est sans doute aussi que je me suis promené l’après-midi justement dans l’endroit des narcisses, le marais de Vaux, dans le bas du village. C’est aménagé, maintenant, protégé, avec des panneaux explicatifs de la faune et de la flore. A l’époque, les gamins traversaient ça avec des constructions de leur fait, des planches ou des poteaux. Ou peut-être que les narcisses, c’est une émotion personnelle enfouie. Je me souviens de la prodigalité qui permettait, au moment voulu, des bouquets en veux-tu-en-voilà. Mais l’émotion des narcisses vient plus loin que ma vie. Vient, par exemple, d’un enfant de onze ans loin des siens et de la montagne, coincé dans une salle de classe dans une ville tiède au moment où, sur le plateau, les narcisses envahissent partout…  
« Tout était passion chez elle, la maternité, l’art, l’amitié, le dévouement, l’indignation, l’aspiration religieuse ; et comme elle ne savait et ne voulait rien modérer, rien refouler, son existence était d’une plénitude effrayante, d’une agitation au-dessus des forces humaines… »

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B onne réponse


« Comment se fait-il qu’on ne vous connaisse pas tant que ça ?
— Parce que les gens n’en ont pas que ça à foutre. »

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